Azaka n'est pas musulman

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Auteur : Rodney Salnave
Fonction : Dougan (Scribe)
Date : 9 mars 2017
(Mise à jour : 5 nov. 2019)

Dans le panthéon de la Tradition ancestrale haïtienne, se trouve le Jany ou Lwa de l'agriculture du nom d'Azaka, communément appelé Zaka, Kouzen Zaka, Minis Azaka, Azaka Mede, etc. Mais, des textes anciens ont fait allusion au nom d'Azaca par rapport aux Amérindiens d'Amérique du Sud, du Pérou, plus précisément :

 "Tandis que les manas d'Azaca l'arrachaient des bras de son amant, Therelle prenait avec Mural la route du Port..." (1)


1- Azaka et les Taïnos


À partir de cela, flottait l'idée qu'Azaka, le Jany ou Lwa paysan dans le rituel haïtien, serait issu de la tradition des Taïnos, les premiers habitants de l'île. Cependant, aussitôt qu'en 1981, Gérard Montilus a démontré qu'Azaka puisait sa source en "Afrique" plutôt que dans les populations pré-colombiennes :
 "Also, the name of the agricultural deity Azaka can be traced to an African rather than a Taino source (Montilus 1981:73-84)." (2)
Traduction :
"Aussi, le nom de la divinité agricole Azaka peut être tracé à une Africaine plutôt qu'à une source Taïno (Montilus 1981:73-84)."
Cependant, en dépit de la clarification de Montilus, les révisionnistes - dont la mission n'est pas scientifique, mais plutôt prédatrice (consciente ou inconsciente), étant d'extirper aux Haïtiens tout élément élévateur puis d'en donner crédit à autrui - préfèrent attribuer Azaka aux Amérindiens (Taïnos) qui habitaient l'île avant l'arrivée des Européens :
a)
"Zaka, whose name probably derives from the religion of the indigenous Indians of Haiti, takes his envisaged personae from Benin's Yalóde." (3)

Traduction :
"Zaka, dont le nom provient probablement de la religion des Indiens d'Haïti, prend ses personnages envisagés de Yalóde du Bénin.*"
b)
"Major Vodou divinities, in addition to Loko, link to our indigenous heritage :
 Zaka, the Lord of Agriculture and labor, whose representation is anthropomorphic and signifying land plots amidst the leaves, the neolithic era." (4)
Traduction :
"Les divinités majeures du Vodou, en plus de Loko, sont liées à notre patrimoine indigène :
  Zaka, Seigneur de l'agriculture et du travail, dont la représentation est anthropomorphique et signifiant des parcelles de terrain au milieu des feuilles, l'ère néolithique.
"

Nous traiterons ailleurs de la révision amérindienne faisant partir de ce que l'historien Francis Arzalier appelle le "volontarisme historique" chez l'Haïtien :
"République "noire" née d'une révolution anti-esclavagiste, Haïti est à la jonction d'influences africaines et françaises. Seule, en ce melting pot, l'antériorité caraïbe est quasiment absente, tant les indigènes 'indiens" ont été dévastés. Le nom indien donné à Saint-Domingue, Ayti, relève du volontarisme historique." (5)
Autrement dit, en dépit du fait que ses ancêtres n'ont jamais croisé les premiers habitants de l'île qui furent éradiqués près de 150 ans avant l'arrivée des dits ancêtres**, l'Haïtien, tout en dénigrant l'"Afrique" de ses origines, adopte par rapport au Taïno une attitude volontariste :
"Volontarisme: n.m. 1. Attitude de qqn qui pense modifier le cours des événements par la seule volonté. 2. PHILOS. Doctrine ou thèse qui accorde la primauté à la volonté sur l'intelligence et à l'action sur la pensée intellectuelle." (6)
Ceci dit, revenons sur la révision islamique, le propos de ce présent travail. Optant pour une piste non-amérindienne, l'écrivain révisionniste Jeannot Hilaire proposa qu'Azaka provint des coutumes arabo-musulmanes :


 "asaka, wolof  = prémices ; azata fongbe = grenier; zaka, arabe & haussa = dîme payable en produits agricole (V.J. Guy-Grand 1890). - En cr.-haït., zaka, azaka - loa protecteur des paysans; il reçoit en guise d'hommage des dons en denrées agricoles." (7)


 "zak(k)â / djakka, hausa = dîme religieuse payable en denrées agricoles; asakâ = prémices; zakat, arabe = dîme, impôt (M. Delafosse 1955, p. 151). - En cr.-haït., zaka = loa paysan: celui qui en est possédé circule habituellement avec une besace en fibres de latanier suspendue à son cou pour y recueillir des dons de la ferme en hommage des familles qui le reçoivent." (8)
À première vue, le mot arabe "zakat", c'est-à-dire la dime-aumône, formant l'un des cinq piliers de l'islam, semble comporter des traits de familiarité avec Azaka, le Lwa agraire haïtien chez qui l'alimentation et le partage de denrées est clé. Cependant, l'histoire s'écrit à l'aide de faits, non de suppositions paresseuses. Et dans le cas qui nous concerne, trouver l'origine réelle d'Azaka ne consistait pas une tache particulièrement difficile. Mais, y a-t-il de plus aveugle que celui ou celle qui ne veut pas voir?


2- Azaka dans la colonie de Saint Domingue

Il se trouvait, dans la colonie de Saint Domingue (Haïti) plusieurs individus du nom d'Azaka. Le cas fut tellement répandu que l'écrivain Jean Baptiste Picquenard, un contemporain de la révolution haïtienne, nomma "Azaka" l'un des personnages de son roman historique :
"Cependant, il y en a occasion où hommes bons être contraints d'être méchants. Vous, par exemple, ô bon ami à moi !*** n'avez-vous pas été forcé de tuer le nègre-brigand Azaca?" (9)
"La providence voulut que le noir Azaca, amant favorisé de la négresse Zerbine, eut la faiblesse de raconter tous les projets du père à sa maîtresse, en lui promettant d'avance l'argent et les bijoux dont il allait devenir possesseur." (10)
"Quand Philémon eut fait ces premières démarches, il fit venir les nègres Jean-Pierre et Azaca, qui lui était très-dévoués, et leur dit d'un ton d'inspiré, que Dieu les avait choisis pour venger sa sainte religion, si indignement outragée..." (11)

3- L'origine d'Azaka

Les linguistes ont retracé la provenance d'Azaka au Bénin traditionaliste :
"Azaka n. ‘loa’ haï. Azaka, Zaka ‘loa paysan’ (C-SSur ; HCED), Azaka ‘lwa of agriculture and farmers and the protector of travelers’ (Perusse Azacca ; ALH 1349/10 ; BHe 213-214) ; ► haï. Azaka-vodou, Azaka-mede, Azaka-si ‘loa’ (Métraux 1958/2007, 78) ; lwa Agann Zaka ‘loa’ (ALH 1349/10). ◄ Orig. afric. C-SSur : fon azaka ‘(Verger, Dahomey) vodoun de Tohossou’. – Peut-être rapport avec fon azà ‘chapeau’, azagbagbà ‘grand chapeau de paille’ (Se/Ra) (Azaka porte un chapeau de paille). – L’élément Agann reste à expliquer." (12)
"Azaka-si ou Azaka-Yombo n. pr. : Lwa considéré comme "le spécialiste de l'agriculture et de l'économie". Il remplirait les mêmes fonctions que Saint Isidore. Par pouvoir Ministre Azaka, l'Homme-Tonnerre. Azaka-Si, Azaka-Yombo-Vaudou, Azaka-Kola, Nègre Arompla Vaudou. Ago ! (ALEXIS, Les Arbres musiciens, p.198). Au Congo, AZAKA : terme qui renvoie à des divinités protectrices. En fongbe, AZAKA : fétiche de la région de Savalou + SI : suffixe entrant dans la composition de beaucoup de mots. Citons les cultes des Gédés de Canna et celui d'Azaka de Savalou qui ont presque disparu au Dahomey et sont très populaires en Haïti. (VERGER. Raisons de la survie des religions africaines… p.145). E (d)o Azaka'si : Entre les mains d'Azaka. Azaka sí : Femme vouée au culte d'Azaka." (13)
Donc, Azaka fut le nom d'un Vodun (Lwa) de la région de Savalou. Quoique son culte serait quasi disparu dans sa terre béninoise, Azaka, tout comme le Vodun royal Agassou, rayonne toujours en Haïti où un nombre significatif de ses serviteurs de l'ethnie mahi fut déporté :

 (...)
"En Haïti et à Bahia au Brésil, on trouve bien parmi les descendants d'Africains, le culte des Vodoun dont les noms sont connus à Abomey, mais ce sont tous des Vodoun qui appartiennent aux pays voisins (qui dit voisin dit ennemi) et que les gens d'Abomey, les Fon, ont adoptés par droit de conquête, d'alliance ou d'achat.
(...)
Agongono qui fut facilement trouvé être Agonglo.
Savalou ou Azaka (de Savalou) qui joue un rôle important dans le culte des Tohossou (Zomadonou)
Dadaho serait Agassou, le vodoun des rois d'Abomey." (14)
Évidemment, en Haïti, des chants sacrés, comme celui-ci en honneur du Lwa agraire Azaka, font référence à Savalou :
Jaden mwen lwen, mayi m ape pouse, ago e.
Jaden mwen lwen, mayi m ape kase, ago e.
Jou m pran yon fanm, li pa pote panyen nan tèt, Savalou e.
Traduction :
Mon jardin est loin, mon maïs grandit, ago e.
Mon jardin est loin, mon maïs se brise, ago e.
Le jour où je prendrai épouse, et qu'elle ne porte pas de panier à la tête, Savalou e.

Il est également remarquable qu'au-delà du culte d'Azaka, de la danse mahi ou du culte de Danmbala & Ayida Wedo.**** qu'elle fournit, la région de Savalou est elle-même toujours célébrée en sol traditionnel haïtien. Ce chant sacré suivant, venant du Nord d'Haïti où la cérémonie du Bois Caïman (Bwa Kayiman) a eut lieu,  nous le démontre :

Savalou e Papa Pyè, Savalou e
Savalou e Papa Pyè, Savalou e
Papa Pyè, m pa manje gonbo, yo vle m lave chodyè, Savalou e
Traduction :
Savalou e Papa Pyè, Savalou e
Savalou e Papa Pyè, Savalou e
Papa Pyè, je n'ai pas mangé de gonbo, on veut que je fasse la vaisselle, Savalou e


Savalou, Bénin
 Source : https://fr.wikipedia.org/wiki/Savalou


4- Les collines de Savalou

Ce Royaume Mahi de Savalou, fondé en 1557 est gouverné par les "Gbaguidi, signifiant « chef puissant ». Ce nom fut donné lors de son sacre au premier roi". (15) Et évidemment, Gbaguidi est répertorié dans la Tradition haïtienne par les Lwa Gagidi Bago, Nago Gagidi Bago, Nèg Gagidi Bago, etc.


(Palais Royal de Savalou)
Source : Bénin Tourisme. Lien permanent : http://www.benin-tourisme.com/decouvrir/ville/savalou

Une autre particularité de Savalou est qu'il est montagneux :


 
(Collines de Savalou)
Source : Bénin Tourisme. Lien permanent : http://www.benin-tourisme.com/decouvrir/ville/savalou

Et, cette spécificité topographique de Savalou est ancrée par ce chant sacré haïtien parlant des mornes divines de Savalou d'où provient Legba, le Jany, le Lwa ouvrant les passages divins :


Legba kore, anye Legba, Legba kore, anye Legba
M rele Papa Legba, Mouche Legba, ki soti mòn Savalou we
Legba kore, anye Legba, Legba kore, anye Legba
Traduction :
Legba kore*****, anye Legba, Legba kore, anye Legba
J'appelle Papa Legba, Monsieur Legba, qui provient des mornes de Savalou eh
Legba kore, anye Legba, Legba kore, anye Legba


"Celebration Maitresse Filomiz Sept 2013 - Societe LEGPHIBAO" ;
Lien permanent : https://www.youtube.com/watch?v=5t-XDJUP9Yw ; Timeline : 35:45 - 37:47.


5- "Alaso", la salutation d'Azaka

Dans le rituel traditionnel haïtien, on salut la Divinité Azaka par le cri sacré : Alaso ! Cette salutation révèle de manière non équivoque la nature traditionnelle d'Azaka. D'abord, que veut donc dire "Alaso"? Dans la langue Yoruba (Nago), "Alaso" signifie généralement un "possesseur de vêtements", un "vendeur de vêtements" ou même un "tisseur". Il est composé du préfixe de possession "Al" et du nom "Aso" signifiant étoffe ou vêtement :


"The vowels, a, e, &, prefixed to li or ni, to have, form the prefixes al, el, ẹl, ol, ọl, &, which form nouns of possession from other nouns; as, alaśọ, the owner of cloth, a dealer in cloth (from aśọ, cloth)." (16)
Traduction :
"Les voyelles, a, e, &, préfixées à li ou ni, doivent avoir les préfixes al, el, ẹl, ol, ọl, &, qui forment des noms de possession à partir d'autres noms; tel alaśọ, le propriétaire d'un vêtement, le revendeur de vêtements (de aśọ, toile)." 
Chez les Yoruba les tissus (vêtements) sont des signes d'immortalité, de lucidité d'esprit, d'attirance, de talent artistique, de perfectionnement, etc. autant pour les mortels que pour les Orisha (Divinités Yoruba). Ce qui les fait dire que l'on salue les vêtements avant de saluer l'individu qui les porte. (17) Et grâce à son accoutrement rustique stylé et ses accessoires de paysans distinctifs, Azaka correspond d'emblée à Alaso décrivant un "possesseur de vêtements".

(Vêtements et symbôles d'Azaka, Divinité (Lwa/Jany) haïtienne de l'Agriculture)
Source : Hërsza Barjon. "Azaka". https://olneyonceonthisisland.wordpress.com/2014/03/25/divine-haiti-portraits-of-the-lwa-by-hersza-barjon/01_azaka_jpg/

Mais Azaka représente d'avantage que des tissus, vêtements et accessoires rustiques. Il est la Divinité (Lwa/Jany) de l'Agriculture de manière intégrale. Son salutation, "alaso", illustre ce point. Car, le mot "asọ" (dans al-aso) pour sa part, est composé du préfixe de possession "a" et du verbe "sọ" voulant dire "bourgeonner, régénérer" :
"The Yoruba word for cloth and clothing is aṣọ or asọ. Adding the prefix "a" to "sọ" ("to bud", "to regenerate") forms the noun aṣọ or asọ. Aşọ can therefore be interpreted as that which renews and survives one at death. Aṣọ is the agency of regeneration, a rebirth among humans and the òrìṣà." (18)
Traduction :
"Le mot Yoruba pour tissu et vêtement est aṣọ ou asọ. Ajouter le préfixe "a" à "sọ" ("bourgeonner", "régénérer") forme le nom aṣọ or asọ. Aṣọ peut donc être interprété comme ce qui se renouvelle et survit à la mort. Aşo est l'organisme de la régénération, une renaissance parmi les humains et les òrìṣà"
En d'autres termes, Alaso (Al + aso) évoque "quelqu'un qui bourgeonne, qui régénère", ou "qui fait bourgeonner et régénérer". En tant que salutation, il exprime l'essence d'Azaka, la Divinité (Lwa/Jany) de l'Agriculture. Car il rappelle la semence qui bourgeonne et régénère la plante.

5.1- Savalou et la tradition Yoruba

Pourquoi "Alaso", un mot tiré de la tradition Yoruba (Nago) conviendrait à Azaka, une Divinité venant de Savalou, une région béninoise habitée par le peuple Mahi?  La réponse est logée dans le nom Savalou. Si les conquérants Fon ont désigné cet endroit Savalou, les locaux continuent de l'appeler par son véritablement nom : Sha-be-lu (Shabelou). Ainsi va pour les villages de Dassa (Da-Sha) et de Savé (Sha-be), dont les noms originaux, encore utilisés par les locaux, font référence aux premiers habitants des lieux, le peuple Sha de langue Yoruba (Nago). (19)
En décortiquant le nom Sha-be-lu, dans la langue Yoruba (Nago), tout devient limpide.
Sha : "nom de l'ethnie Yorubaphone de la région" + Be : "sauter de place en place, agir sans permission" (20) + Lu : "découvrir, vint à remarquer". (21)

Donc, en Yoruba, "Sha be lu" réfère au lieu (Savalou) que : les Sha, errant de place en place, ont découvert et s'y sont installés, sans la permission de qui que ce soit. Le nom véritable des villages Dassa (Da-Sha), et Savé (Sha-be) comporte cette même référence. (22) Longtemps après, vers les années 1645 -1680, le peuple Mahi venant du Sud, s'est s'installé à Shabelu (Savalou). Il a, au fil du temps, subi de forte influence de la tradition des Yoruba, ses voisins, aussi que celle des peuples Gen et Fon. (23) Le résultat de ce mélange de traditions inter-ethniques se vit dans la salutation d'Azaka et dans bien d'autres aspects du rituel ancestral haïtien.
L'un de ces aspects se présente en Haïti, en "Sanyan", un attribut de la Divinité (Lwa/Jany) Legba. Legba, pourtant originaire du peuple Fon du Bénin (Dahomey), est dit Legba Sanyan. Le mot "Sányán", signifiie "Soie" en langue Yoruba (Nago). Il forme, avec Etù et Àlàári, les 3 tissus de qualité supérieure appelés "Aso oke" par les Yoruba (Nago).

(Tissu Sányán)
Source : https://bellafricana.com/the-history-of-aso-oke-textile/

Ces tissus de nobles sont particulièrement remarqués lors des grandes occasions.

(Vêtements à tissu Sányán lors d'un événement sacré Yoruba, au Nigeria)
Source : https://bellafricana.com/the-history-of-asooke-cloth-weaving/

Ainsi, "Sanyan" (affilié à Legba) et '"Alaso" (affilié à Azaka) sont, dans le rituel traditionnel haïtien, des traces du statut sacré que les Yoruba (Nago) accordaient aux tissus et vêtements. 

Conclusion
Pour conclure, nous dirons qu'il nous a suffit d'effleurer le passé historico-religieux d'Haïti afin de prouver, hors de tout doute, que le culte agraire d'Azaka, tel que perpétué en Haïti, trouve son origine exclusivement dans la religion ancestrale issue du Royaume béninois de Savalou. Et de même, nous concluons qu'aucun lien n'existe entre ce culte d'Azaka Mede Soubwa Vodou avec la dîme arabo-musulmane, ni avec un quelconque héritage amérindien appartenant plus à des fantasmes xénophiles qu'à la réalité. D'ailleurs, faits interdits par l'islam, Azaka exige des boissons fortes (tafia), et son plat emblématique est le tchaka, un mélange à base de maïs en grain, de pois et de porc :


(Tchaka)
Source : http://tchakayiti.com/home/tchaka-family-tradition/
"TCHAKA, A FAMILY TRADITION
INGREDIENTS 1 part red beans, 1 part dried corn, 1 salt-cured pork feet, Pumpkin (optional). Garlic. Salt & Pepper to taste. Piment bouc. INSTRUCTIONS Cook the beans and corn in unsalted water. Thoroughly cook the pork feet covered in water in a separate pot. When the corn and beans are ready, add the pork meat to the mix and season to taste. Let simmer until the desired thickness is achieved. Serve hot as a main dish." (24)
Traduction :
"TCHAKA, UNE TRADITION FAMILIALE
INGRÉDIENTS 1 part de haricots rouges, 1 partie de maïs séché, 1 enduit de pied de porc salé. Giraumon (optionnel). Ail. Saler et poivrer au goût. Piment bouc. INSTRUCTIONS Cuire les haricots et le maïs dans de l'eau non salée. Faire cuire les pieds de porc couvert dans l'eau d'un pot séparé. Lorsque le maïs et les haricots sont prêts, ajouter la viande de porc au mélange et assaisonner au goût. Laisser mijoter jusqu'à ce que l'épaisseur souhaitée est atteinte. Servir chaud comme plat principal."


* Yalóde n'a rien à voir avec le culte agraire au Bénin, ni en Haïti. Il est, en Iyalode, un titre politico-religieux attribué à des femmes de pouvoir guerrier (25) dans la Tradition des Yoruba-Nago du Nigéria et du Bénin. Ce titre sacré féminin est retenu en Haïti en "Eyalode" dans le rite guerrier Nago. L'auteur révisionniste voulait, vraissemblablement parler du culte béninois de Sakpata, le Vodun de l'agriculture et de la variole. Mais Sakpata, le Vodun agraire des Fon diffère énormément d'Azaka, le Vodun agraire des Mahi. Car, "Au Bénin, SAKPATA est le roi de la terre. Le jour de marché, quel qu'il soit, pas uniquement le jeudi, quiconque travaille la terre doit souffrir de la variole." (26) Ainsi, face à Sakpata intransigeant et menaçant. dont le nom Sapata est synonyme de maltraitance et de torture dans le créole haïtien, (27) les ancêtres des Haïtiens ont préféré Azaka qui est un Lwa jovial, accessible et aimable que l'on surnomme amicalement "Kouzen" (Cousin).
** 50 ans après 1492, date à laquelle Christophe Colomb et les Espagnols débarquèrent sur l'île qu'ils ont baptisée Hispaniola, (composée de 2 pays : Haïti parlant un créole français et la République Dominicaine parlant espagnol), les Taino, ces premiers habitants de l'île, avaient déjà disparu dans la partie Ouest qui est devenue Haïti. Les Espagnols ont abandonné cette partie occidentale restée déserte pendant plus de 100 ans, jusqu'à ce que des Français nommés Boucaniers en firent domicile à partir de 1654. (28) Cependant, depuis 1570, soit 84 ans avant la présence de Boucaniers dans l'Oeust,  les indiens Taino s'étaient déjà éteints dans l'Est espagnol de l'île. (29) Quant aux ancêtres des Haïtiens, ils firent leur première apparition dans l'Ouest de l'île quelques 109 ans après l'extermination des Taïno dans l'île entière. Car, ce ne fut qu'en 1679 que la France a commencé à larguer des captifs (esclaves) dans l'Ouest de l'île (30) qui n'était même pas encore sa propriété. Ainsi, il n'y avait pas de contact entre les pères des Haïtiens et les indiens Taino qui étaient morts depuis belle lurette. Et comme nous l'indique le premier historien haïtien, le Baron Valentin de Vastey, (31) seuls des artéfacts et des ossements de Taïno blanchis par le temps, se retrouvaient de temps à autre sous les pas des Haïtiens. Certes, bien avant les ancêtres des Haïtiens, il se trouvait des Noirs dans l'île, comme aiment le répéter les révisionnistes. Toutefois, ces Noirs résidaient en pays étranger, dans la partie espagnole, et vu la dureté de leur condition de captivité, n'avaient pas duré assez de temps pour se reproduire. En outre, même s'il aurait eu de métissage entre les Noirs hispaniques et quelques Taino avant la l'extinction de ces derniers, ce métissage n'a pas rejoint les Noirs français. Car, selon Gaspard Théodore Mollien, l'un des premiers à écrire l'histoire d'Haïti, les Noirs espagnols et français ne se mélangeaient pas, puisqu'ils se méprisaient mutuellement. (32)
*** Dans l'expression "bon ami à moi!", on remarque, encore une fois, que même les auteurs français ont tenu compte du marqueur de possession "à" dans le créole du Nord haïtien. Mais toujours, ceux qui prônent arrogamment la falsification "Bwa Kay Iman" se couvrent de ridicule en faisant passer une forme possessive du créole de l'Ouest et du Sud d'Haïti pour une expression authentique du Nord. Pour plus de précision, voir l'article sur Kay + Iman dans le créole du Nord.
**** Auguste Le Hérissé précise qu'à Savalou : "Simultanément au culte de Djisô s'est développé celui de Dan-aïdâ-ouédo, le serpent arc-en-ciel, qui est aussi Vôdoun des Mahis, particulier, croyons-nous, à la tribu des Djinou (gens d'en haut, tombés du ciel". (33) Ainsi, on comprend que la manie des intellectuels haïtiens caducs d'écrire le nom de Danmbala, le Dieu-Serpent Arc-en-ciel, "Damballah" n'est qu'une piètre tentative de leur part d'islamiser ce Vodun primordial de Savalou.
***** Voir l'article sur Tamerlan pour savoir l'origine bambara du concept mystique de "kore".


Notes
(1) Joseph de Rosny. Le Péruvien à Paris, ouvrage critique, historique et moral. Vol.1. Paris, 1801.
(2) Guérin C. Montilus. Africa in Diaspora: The Myth of Dahomey in Haiti. In : Journal of Caribbean History. Vol 2. 1981. pp.73-84. ; cité par David Geggus. "The naming of Haiti" In: New West Indian Guide/ Nieuwe West-Indische Gids 71 (1997), no: 1/2, Leiden, 43-68 ; Lien Permanent :  http://www.kitlv-journals.nl
(3) Leslie Gérard Desmangles. The Faces of the Gods : Vodou and Roman Catholicism in Haiti. North Carolina, 1992. p.171.
(4) Rachel Dominique-Beauvoir. "Reclaiming Indigenous heritage in Haiti- Our Taino Culture is alive and well.". [en ligne] Lien permanent : http://www.tainolegacies.com/154087477 ; Consulté le 4 juin 2016.
(5) Francis Arzalier. Introduction dans : Moeurs d'Haiti - Gaspard Théodore Mollien. Paris, 2002. p.xxx
(6) Dictionnaire Petit Larouse en couleurs. Paris, 1990.
(7) Jeannot Hilaire. L'édifice créole en Haïti, Fribourg, 2002. p.302.
(8) Jeannot Hilaire. Ibid. p.336.
(9) Jean Baptiste Picquenard. Adonis, ou Le bon negre : anecdote coloniale. Paris, 1798. p.234
(10) Jean Baptiste Picquenard. Ibid. p.149.
(11) Jean Baptiste Picquenard. Ibid. p.148.
(12) Annegret Bollée. Mots d'origine non-française ou inconnue "A". [en ligne] 2015. p.29.
(13) Pierre Anglade. Inventaire étymologique des termes créoles des Caraïbes d'origine africaine. Paris, 1998. p.56.
(14) Pierre Verger. "Le culte des vodoun d'Abomey." ‪Études dahoméennes‬, Volume 8. Porto Novo, 1966. p.23.pp.5-28 
(15) Bénin Tourisme. "Savalou" [en ligne]. Lien permanent : http://www.benin-tourisme.com/decouvrir/ville/savalou
(16) Thomas Jefferson Bowen. Grammar and Dictionary of the Yoruba Language. Washington, 1858. p.14.
(17-18) Rowland Abiodun. Yoruba Art and Language: Seeking the African in African Art. New York, 2014. pp.161-164, 162.
(19) G. Parrinder. “Yoruba-Speaking Peoples in Dahomey.” In : Africa: Journal of the International African Institute, vol. 17, no. 2,  (Apr., 1947), pp. 122–129. (pp.125-126)
(20-21) Church Missionary Society. A dictionary of the Yoruba language. Part 2. Lagos, 1913. pp.68-69, 170.
(22) G. Parrinder. Op. Cit. pp.125-126.
(23) Suzanne Preston Blier. African Vodun: Art, Psychology, and Power. Chicago, 1996. p. 357.
(24) "Tchaka : a family tradition" Wednesday November 5th, 2014. [en ligne] ; Lien permanent : http://tchakayiti.com/home/tchaka-family-tradition/ ; Consulté le 29 juillet 2016
(25) African Folklore: An Encyclopedia. Philip M. Peek, Kwesi Yankah (édité par). New York. 2004, p.768.
(26) Pierre Anglade. Inventaire étymologique des termes créoles des Caraïbes d'origine africane. Paris,1998. p.174.
(27) Prophète Joseph. Dictionnaire Haïtien-Français. Montréal, 2003. p.100.
(28) Houdaille Jacques. Quelques données sur la population de Saint-Domingue au XVIIIe siècle. In: Population, 28e année, n°4-5, 1973 pp. 859-872.
(29) Ibid.
(30) Slavesvoyages.org ; Lien permanent :  http://www.slavevoyages.org/tast/assessment/estimates.faces
(31) Baron de Vastey, Valentin. Le Système Colonial Dévoilé. Cap-Henry, 1814.  p.3.
(32) Gaspard Théodore Mollien. Moeurs d'Haiti. Paris, 2006. p.93.
(33) Auguste Le Hérissé. L'ancien royaume du Dahomey, moeurs, religion, histoire. p.118.  Paris, 1911. p.118.



Comment citer cet article:
Rodney Salnave. "Azaka n'est pas musulman". 9 mars 2017 ; modifié le 5 nov. 2019. [en ligne] Lien permanent : http://bwakayiman.blogspot.com/2017/03/azaka-nest-pas-musulman.html ; Consulté le [entrez la date]



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