Les drapo (drapeaux-rituels) ne sont pas islamiques

 

Auteur : Rodney Salnave
Fonction : Dougan (Scribe)
Date : 1 mars 2018
(Mise à jour : 8 août 2020)


1.- Les drapeaux cérémoniels haïtiens et les révisionnistes audacieux

Qu'elle doit être gigantesque, l'audace requise pour que l'on déclare islamiques des objets-rituels haïtiens! Spécialement après avoir observé des femmes et des hommes fraterniser en égalité totale au cours des cérémonies traditionnelles.


(Drapeau cérémoniel haïtien) 
Source : Maya Deren. Divine horsemen the living gods of Haiti. Kingston, 1983. p.198-199.

En effet, la réussite de ces cérémonies traditionnelles haïtiennes, souvent épuisantes, (qui durent parfois plusieurs jours, voir des semaines) dépend de la collaboration entière de tous les participants, indépendamment du genre. Et une telle interaction des sexes est incompatible avec la ségrégation islamique misogyne. 
Nous avons, dans l'article précédent, prouvé hors de tout doute que les vèvè, ces dessins-rituels haïtiens, n'étaient pas influencés par l'islam. Cette fois-ci, nous traiterons des drapeaux-rituels haïtiens, ("drapo" en Créole) auxquels le même petit nombre de révisionnistes prédateurs attribue arbitrairement une origine islamique. L'argument central de ces révisionnistes est que vers l'an 900, les musulmans pouvaient avoir exposé les ancêtres "africains" des Haïtiens, à leurs bannières comportant des signes divers :
"Other scholars have been quick to point out that the introduction of flags to these various regions of Africa may possibly predate the era of European colonization. Islamic peoples are known to have been active in trade with these regions of Africa as early as 900 C.E., and they possibly could have brought their banners with them. European and Islamic flag usage became Africanized and their traditions intermingled with the variety of cultural beliefs and practices of the peoples of Africa. Once enslaved and forcibly mixed with each other, the Africans blended their traditions together to form the unique culture of Haiti. Just as the Lwa and Saints became syncretized, it can also be said that flags and flag culture were as well. And, just as the peoples of Africa asserted their own power through the use of flags, the people of Haiti developed their own traditions regarding flags." (1)
Traduction :
"D'autres chercheurs ont rapidement fait remarquer que l'introduction de drapeaux dans ces diverses régions d'Afrique pourrait être antérieure à l'ère de la colonisation européenne. Les peuples islamiques sont connus pour avoir été actifs dans le commerce avec ces régions d'Afrique dès 900 C.E., et ils auraient probablement pu apporter leurs bannières avec eux. L'utilisation des drapeaux européens et islamiques s'africanise et leurs traditions s'entremêlent avec la diversité des croyances et des pratiques culturelles des peuples d'Afrique. Une fois asservis et mélangés de force les uns aux autres, les Africains ont mélangé leurs traditions pour former la culture unique d'Haïti. De même que les Lwa et les Saints se sont syncrétisés, on peut dire aussi que les drapeaux et la culture du drapeau l'étaient aussi bien. Et, tout comme les peuples d'Afrique ont affirmé leur propre pouvoir grâce à l'utilisation de drapeaux, le peuple d'Haïti a développé ses propres traditions concernant les drapeaux."
Comme nous l'avons déjà souligné, de telles suppositions relèvent du mépris raciste présent chez l'étranger autant que chez l'Haïtien occidentalisé. Pour ceux là, le Noir (d'"Afrique", d'Amérique ou d'ailleurs) est incapable de produire quoi que ce soit de valable. Ainsi, tout ce qu'il possède de précieux doit forcément provenir d'une source externe : arabo-musulmane, amérindienne, occidentale, asiatique, etc. Et lorsqu'aucune preuve ne soutient leurs affirmations génocidaires, ils trouvent toute sorte de stratagèmes afin de rendre vraisemblable leurs balivernes. Nous allons donc, par cet article, continuer à exposer les failles de leurs arguments. 


2- L'origine des drapeaux cérémoniels haïtiens et l'héritage Loango

Voici des drapeaux cérémoniels haïtiens à l'oeuvre.


(Drapeaux cérémoniels haïtiens)
Source : Milo Rigaud. La Tradition Voudoo et le Voudoo Haïtien. Paris, 1953. p.1. fig.1.

Des bannières similaires à celles des Haïtiens étaient utilisées dans la cour du Roi de Loango. Cette illustration initialement publiée en 1668 (soit 11 ans avant le début de débarquement des ancêtres des Haïtiens à Saint Domingue) nous le prouve :


(Bannière du Roi de Loango (Angola-Congo))
Source : Olfert Dapper. Description De L'Afrique... Amsterdam, 1686. p.331.*

Cette illustration de 1668 d'Olfert Dapper fut réalisée d'après la description de missionnaires hollandais ayant visités Loango au début des années 1600. Cela signifie qu'au Royaume de Loango, les bannières symboliques précèdent la visite des missionnaires.




(Royaume de Loango)
Source : Olfert Dapper. Description De L'Afrique... Amsterdam, 1686. pp.320-321.

Et le rituel haïtien, étant de nature monarchiste, le Roi de Loango est toujours vénéré en Haïti sous l'appellation de Wa Loang ou Wa Loango. Car, il se trouvait des captifs (esclaves) originaires de son Royaume à Saint Domingue :


"A Saint-Louis, le 16 de ce mois, est entré à la Geole, un Nègre nouveau, nation Loango, étampé sur le sein droit, autant qu'on a pu le distinguer ERLE, taille d'environ 5 pieds, ne pouvant dire son nom, ni celui de son maître." (2)
Mais, généralement, on désignait les captifs Loango sous diverses dérivées : Colango, Coulango, Coulingo, Coulongue, ou Soulango. (3) Loango est le pays d'origine des Lwa Simbi Yanpaka Ponggwe, et Jean-Pierre Pongwe originaires de l'ethnie Mpongwe (du Gabon actuel). Et le Royaume de Loango, situé sur la côte atlantique de l'"Afrique" Centrale, ne connaissait pas de présence musulmane :


(Royaume de Loango)
Source : Carte du Golfe de Guinée - Geographicus - Bonne, 1770.

D'ailleurs, l'alcool, proscrit par l'islam, était consommé au Royaume de Loango, soit sur la forme de vin de palme, soit sur la forme d'eau-de-vie (ou alcool forte) :


"Les naturels du pays ne préfèrent au vin de palmier que l'eau-de-vie qu'on leur porte d'Europe." (4)
Donc, vu que, comme nous l'avons mentionné, les ancêtres des Haïtiens commencèrent à débarquer dans la colonie de Saint Domingue qu'en 1679, (soit 11 ans après l'illustration de Dapper), on peut affirmer que les populations en provenance de Loango ont amené l'art et l'usage des bannières symboliques sur cette île.





(Simulacre de combat avec drapeau à Loubou, Sud-Ouest du Gabon (ancien Loango))
Source : Frank Hagenbucher-Sacripanti. Les fondements spirituels du pouvoir au royaume de Loango : République populaire du Congo. Paris, 1973. p.85. Photo 22.




(Simulacre de combat avec drapeaux dans le rituel haïtien)
Source :"Vaudou Haïtien : Salutations La-place et parade des drapeaux" ; Lien permanent : https://www.youtube.com/watch?v=8ejp0BCraeQ

Il ne fait donc aucun doute que la spiritualité Loango a influencé la partie du rituel haïtien ayant trait aux drapeaux et aux combats cérémoniels. Cependant, cette partie du rituel ne peut être qualifié de "Loango" ou "Congo", à proprement parler. Car, due à la nature hybride de cette tradition, ces apports Loango ou "Congo" ont renforcé les rites d'autres ethnies ; notamment le Rada et le Nago. C'est ce que nous allons analyser.


3- Les drapeaux-rituels et la filiation dahoméenne

Il faut dire que si les drapeaux-rituels n'étaient pas l'exclusivité du Royaume de Loango. Le Dahomey en faisait également l'usage, à en juger par les clichés suivants datés du 18e siècle chrétien, pour des fins guerrières aussi bien que religieuses et festives :




(Le Roi Agadja Dossou (divinisé en Haïti en Kadja Bosou) conduisant ses guerriers au combat)
Source :Archibald Dalzel. The History of Dahomy : An Inland Kingdom of Africa ; Compiled from Authentic Memoirs. London, 1793. p.54-55.


(Fête libatoire aux tombes des Rois, époque du Roi Tegbessu Ahade (divinisé en Haïti en Achade))
Source : Archibald Dalzel. The History of Dahomy : An Inland Kingdom of Africa ; Compiled from Authentic Memoirs. London, 1793. p.145-146.

Cependant, les Dahoméens se servaient non pas de drapeaux, mais de parasols pour afficher leurs symboles spirituels :


"The high stool and umbrella of the most important reincarnated ancestor." (5)
Traduction :
"Tabouret surélevé et parapluie de l'ancêtre réincarné le plus important."
Et les Dahoméens se servaient également des parasols pour  afficher les symboles de la royauté :


(Insigne royal de Behenzin, Roi d'Allada ou du Dahomey)
Source : "Le roi d'Allada (1900)" ; Fonssagrives, Jean Baptiste Joseph Marie Pascal - New York Public Library. 

Et, nous avons, certes reconnu, dans emblème royal dahoméen, l'icône de la Divinité haïtienne Èzili Freda Dawomen :


(Symbole d'Èzili Freda Dawomen en Haïti)
Source : "Vaudou Haïtien : Salutations La-place et parade des drapeaux" ; Lien permanent : https://www.youtube.com/watch?v=8ejp0BCraeQ


4- Les drapeaux-rituels et la filiation Yoruba/Nago

Toutefois, les drapeaux-rituels haïtiens n'étaient pas uniquement l'affaire des Dahoméens et des Loango. Ils résultent plutôt d'un mélange de divers apports ethniques en provenance de l'"Afrique" traditionnelle. Ainsi, le sabre (ici entre les mains du Laplas Kay) combiné aux drapeaux faits d'étoffes scintillants (recouvrant les hounsi) est une pratique Yoruba du Nigeria, du Bénin, et d'autres endroits connaissant le rituel des Egungun.




(Drapeaux scintillants et sabre en Haïti)
Source :"Vaudou Haïtien : Salutations La-place et parade des drapeaux" ; Lien permanent : https://www.youtube.com/watch?v=8ejp0BCraeQ

Voici, au Nigeria, la même combinaison du sabre et des icônes scintillants dans le rituel des Egungun.  Les Egungun étant des Entités divines de l'ethnie Yoruba (dit Nago dans les Amériques), se situant à mi-chemin entre le monde des vivants et celui des Rois et grandes dignitaires décédés :


(Costumes scintillants et sabre d'Egungun en "Afrique" de l'Ouest) 
Source : Christoph Henning, Klaus E. Müller, Ute Ritz-Müller. Afrique-La magie dans l’âme : rites, charmes et sorcellerie. Könemann, 2000. p.360


(Costumes d'Egungun Yoruba-Nago)
Source : Christoph Henning, Klaus E. Müller, Ute Ritz-Müller. Afrique-La magie dans l’âme : rites, charmes et sorcellerie. Könemann, 2000. p.355.

Très clairement, le style et l'étoffe des drapeaux-rituels haïtiens dérive des costumes des Egungun. L'origine de ce costume réside dans la tradition Yoruba qui y associe : la mort, la résurrection, la poésie, "les étoffes, le vent et le pouvoir". (6) Afin de mieux cerner ce point, il faut se référer aux "Rara" qui sont un autre aspect de la tradition Yoruba conservée en Haïti.


4.1- Les textures des drapeaux et la tradition Yoruba-Nago des Rara

Les costumes et sermons des Egungun, ont laissé leur marque en Haïti particulièrement dans les "Rara" qui sont des sorties de groupes musicaux déguisés. Ces groupes "Rara" haïtiens offrent des chants improvisés issus des chants poétiques que l'on appelle également "Rárà" chez les Yoruba (Nago) :
"Rara : genre poétique de louanges récité sur un mode de cantillation (sorte de chanter-parler) spécifique par des poètes professionnels. Ceux-ci se produisent lors de manifestations importantes cérémonies d'intronisation d'un roi ou d'un chef notamment." (7)
"Rárà", veut dire "faire du bruit" en langue Yoruba, (8) et c'est identique chez les Afro-Américains et en Créole haïtien :
"Utilisé à la fois comme nom et comme adjectif, le terme « rara » désigne plusieurs éléments. Il signifie « vacarme » dans l’expression pa vin fè rara la a (éviter de faire du vacarme dans cet espace), sens proche de son origine africaine." (9)
Plus que que bruit, chez les Yoruba, les "Rárà", étaient des chants poétiques dédiés à leur Souverain (Oba). Cette tradition Yoruba s'est poursuivie en Haïti, donnant ainsi naissance aux festivités dites Rara. Voici les costumes Rara haïtiens :


(Costumes Rara en Haïti)
Source : Pierre Turgeon, 2011 ; http://www.ipimh.ulaval.ca/fiche-rara-leogane-19.html


(Costume Rara en Haïti)
Source : Elizabeth McAlister. Rara! Vodou, Power. and Performance in Haiti and its Diaspora. Berkeley, 2002.

Observons maintenant les costumes similaires des Egungun Yoruba (Nago) :


 (Costumes Egungun des Yoruba au Nigeria)

Source : Robert Farris Thompson. African Arts in Motion : Icon and Act... London, 1974. p.220.

La transmission est donc directe du pays Yoruba à Haïti où l'on vénère toujours les Egungun sur le nom de Gougoun, ou Ti Gougoun, dans le rite Nago. Ce rite Nago provient du Royaume Yoruba d'Oyo (appelé Ayo à Saint Domingue) (10) et mémorisé en Nago Oyo, dans le rituel traditionnel haïtien.
De plus, chez les Yoruba, le rara est une forme d'Oriki, c'est-à-dire de poésie offrant des louanges :
"Virtually all Òyó-Yorùbá royal bards perform in a tune peculiar to the Òyó speaking communities, known as rárà. According to Wolff (1962: 45), “rara is a chanted variety of oríkì. The term is used to refer to any kind of eulogy chanted or recited in which various types of personal names, including oríkì, play a prominent part”." (11)
Traduction :
"Pratiquement tous les bardes royaux Òyó-Yorùbá jouent un air particulier pour les communautés parlant Òyó, connu sous le nom de rárà. Selon Wolff (1962: 45), "rara est une variété chantée d'oríkì. Le terme est utilisé pour désigner n'importe quel type d'éloge chanté ou récité dans lequel divers types de noms de personnes, y compris l'oríkì, jouent un rôle important"."
Cet auteur-ci définit "Oriki" en ces termes :
"Oriki, (cf, ki) appellation personnelle, poème de louange donné à toute entité du monde yorùbà (lignage, ville, plantes, animaux, etc.). Les oriki forment la matière principale de toute la poésie yorùba.
Ki ni oriki omo yin? Àriké ni.
Quel est l'oriki de votre enfant?
C'est Ariké. Ki wôn tô le sode, àwon ode ri fi oriki ki àwon eranko. Avant d'aller à la chasse, les chasseurs saluent les animaux pour leur oriki." (12)
"Oriki", ce part de poésie contenu dans tout entité, est également maintenu dans le rituel haïtien via les chants sacrés tels ceux-ci :

Chant 1 :
Achade Oriki e, peyi a chanje
Achade Oriki sa e, Oriki e, peyi a chanje 
Traduction :
Achade Oriki e, le pays a changé
Achade Oriki sa e, Oriki e,  le pays a changé

Chant 2 :
Orikiki e, anye o
Orikiki e, anye o, Ogoun Achade

Dans le contexte haïtien, "Oriki" ou "Oriki ki", la poésie divine Nago, est associée au Lwa Achade qui fut le Roi du Royaume Yoruba (Nago) de Refurefu (Lefoulefou ou Lefulefu en langue Fon), (13) au Nigeria actuel. Cela atteste du caractère monarchique du rituel Yoruba dont Haïti a hérité. La tradition Rara et les décorations des drapeaux cérémoniels n'en sont qu'un mince échantillon.


4.1.1- Origine des costumes en friches et la signification du Rara

Qu'est-ce donc la signification du phénomène Rara et des costumes en friches qui l'accompagnent?
D'après la tradition Yoruba (Nago), le Rara tient en 3 mots : "Tissus, Vent et Puissance". (Trad.) (14)

Les Tissus
Selon la tradition Yoruba, (15) les vêtements des Egungun (mêlés aux chants rara, pour faire le "rara" des Haïtiens) provient de la mort du Orisha de Chango (des fois celle d'autres personnages). Chango, l'Orisha du Tonnerre, suite à une épidémie s'apparentant à la variole décéda. Et Oya, la Orisha du Vent (et femme d'Ogoun) consulta un Maître-divinateur qui lui conseilla d'apposer 3 trois tissus de couleur rouge sur le cadavre. Oya suivit les conseils et dès qu'elle déposa les 3 tissus sur le cadavre, la tête de ce dernier se souleva. Chango ressuscita. Et au fur et à mesure que de grands dignitaires mourraient, des morceaux de leurs vêtements s'ajoutèrent au lot de tissus utilisés (appelés Eku). Et on y confectionna les costumes d'Egungun, le fils de Chango et d'Oya, qui symbolisa le mort ressuscité.


(Costume Alabebe Egungun du Nigeria)
Source :  https://yorubaperformance.weebly.com/the-image.html

Voilà pourquoi, en Haïti, les bandes Rara opèrent, hormis pour marquer des moments importants ponctuels, principalement durant la semaine sainte du calendrier catholique. Cette période marquant la mort et la résurrection de Jésus fut choisie parce qu'elle correspond à la mort et la résurrection de Chango, l'Orisha ou Dieu du Tonnerre des Yoruba (Nago). 
(Costumes Rara en Haïti)
Source : http://www.galembo.com/rara/index.htm

D'ailleurs, comme les Yoruba, les officiants du Rara haïtien associent également les défunts à leur pratique :
"Les rituels consistent, d’après Saint-Louis Perpilus, « à rendre hommage aux esprits protecteurs et aux membres décédés de la bande »." (16)
Et, en conformité aux tissus de couleur rouge placés sur le cadavre de Chango, le rouge est la couleur qui prédomine dans le Rara haïtien :
(Rituel préalable au défilé Rara en Haïti)
Source : Rituel vodou avant la sortie d'une bande de rara. IPIMH 2008 ; http://www.ipimh.org/fiche-rara-leogane-19.html
 (Musiciens du Rara haïtien)
Source : http://www.lenational.org/quel-rara-aujourdhui/
(Bande Rara L'Oraj, en Haïti)
Source : http://www.jacmelrara.org/jacmel-rara/loraj-the-storm-of-cyvadier-2/


Le Vent
Oya (Okan Imede Oya, en Haïti), la Orisha du Vent fut au coeur de la résurrection de Chango (Ogou Changgo en Haïti), son concubin. À l'aide de son costume d'outre-tombe, leur fils Egungun fait donc des tournoiements qui soulèvent le Vent cosmique.


Source : Davide Comelli. https://www.flickr.com/photos/neslab/7592132850/


Source : Anthony Pappone. https://www.flickr.com/photos/ronnyreportage/7598578504


(Egungun faisant des rotations au Bénin)
Source : https://yorubaperformance.weebly.com/the-image.html

Dans les Rara haïtiens, les majors-joncs soulèvent également le Vent cosmique à l'aide du tournoiement de leurs bâtonnets (jonc) qui écartent les mauvais esprits.


Source : La bande de rara Tirailleurs © IPIMH 2008 ; http://www.ipimh.org/fiche-rara-leogane-19.html


(Majors-joncs faisant des rotations lors du Rara haïtien)
Source : Saincilus Ismael https://www.pinterest.ca/pin/266345765443282524/

Le Major-jonc des Rara tire donc son nom de l'instrument de fanfare qu'est la canne de tambour major dont il se sert. Nous trouvons ce même bâtonnet dans la tradition des Egungun. Il est utilisé par un "Minder", c'est-à-dire un surveillant, un membre de l'association des Egungun qui s'en sert afin d'empêcher tout contact physique avec l'Egungun.


("Minder" usant du bâtonnet dans le culte des Egungun au Bénin)
Source : https://www.mirror.co.uk/news/world-news/gallery/mysterious-living-ghosts-who-walk-10714320

Car, le contact physique d'une personne avec un Egungun entrainerait la mort de la personne et également celle du porteur du costume d'Egungun. (17) En Haïti, la fonction de tenir la foule (et les mauvaises énergies) à l'écart revient à celui portant le titre de "Colonel". Toutefois, à la place du bâtonnet se trouvant entre les mains du Major-jonc, il fera claquer un fouet dit "Kach" .


(Colonels Rara avec leurs fouets en Haïti)
Source : http://www.galembo.com/rara/index.htm

La Puissance
Quant à la Puissance, elle vient des Egungun eux-mêmes qui sont des Êtres surnaturels. Elle vient aussi du respect qu'inspire les Egungun dans les sociétés d'"Afrique" de l'Ouest. Car ces derniers entretiennent la moralité sociale en amenant le jugement des ancêtres décédés au quotidien des vivants. En Haïti, la sortie des bandes Rara requiert de la puissance en soit, et s'accumule chemin faisant :
"Suivant la tradition, poursuit-il, « les membres doivent amasser la force spirituelle nécessaire en vue de mener de grands parcours à des heures indues de la nuit », réservées selon la croyance populaire à ceux qui pratiquent des activités mystiques." (18)
Les Rara possèdent également un niveau de puissance qui vient du rôle régulateur de la moralité sociale qu'ils exercent. À l'aide de leurs chansons improvisées, ils rendent hommage aux dignitaires, récompensent les bonnes actions autant qu'ils avilissent les actes répréhensibles.


5- Les drapeaux cérémoniels haïtiens et les jeux d'échec perses?

Les drapeaux cérémoniels (drapo en Créole) et les vèvè ont depuis un certain temps capté l'attention des révisionnistes occidentaux aussi bien qu'Haïtiens, avides de gloire. En apercevant la forme du damier représentée dans les drapeaux et vèvè, les révisionnistes ne pouvaient accepter qu'ils proviennent du génie des Noirs. Pour écarter la religion traditionnelle haïtienne, LeGrace Benson trouva que "the density and elaboration of the motif" la densité et l'élaboration des motifs à carreaux et à losange dépassaient la capacité des Noirs. Ce pourquoi, elle a cherché l'origine de ces symboles hors de l'"Afrique". Et à défaut de pouvoir se l'accaparer, la révisionniste tenta piètrement de l'enlever aux Noirs.


(Vèvè comportant des formes ressemblant aux damiers)
Source : Milo Rigaud. Ve-Ve : Diagrammes Rituels du Voudou. New York, 1974. p.209.

La thèse non convaincante de LeGrace Benson, ayant échouée, le doctorant Jon Bullock a pris le relais en avançant tout comme Benson que les ancêtres des Haïtiens auraient reçu ce schéma en échécier des Arabo-musulmans, mais que ceux-là l'auraient déniché dans les jeux d'échec perses :
"The use of flags during vodou ceremonies resembles the pre-colonial Muslim practice of using flags to decorate the graves of marabouts, and as Benson suggests, the use of the checkered pattern in numerous vevé and flags of the lwa was most likely brought to Africa via Arab Muslims and their Persian chessboards." (19)
Traduction :
"L'utilisation de drapeaux lors des cérémonies vodou ressemble à la pratique musulmane précoloniale consistant à utiliser des drapeaux pour décorer les tombes des marabouts, et comme le suggère Benson, l'utilisation du damier dans de nombreux vevé et drapeaux du lwa a probablement été apportée en Afrique via Musulmans arabes et leurs échiquiers persans."
Jon Bullock, à l'instar de LeGrace Benson, n'a pas cru appuyer son argument par des faits. D'ailleurs, dans son article réclamant la paternité musulmane de la chanson "vodou", ce "chercheur" a eu l'audace de dire d'entrée de jeu qu'il ne pouvait établir de lien direct entre les chansons musulmanes et celles du "vodou" :
"Despite my inability to draw direct historical lines from West African Islamic practice to Haitian vodou music, especially since Islam possesses no universal body of sacred music, I believe that it is important nonetheless for music scholars to understand the complex origins of vodou beliefs and practices as they helped to create a worldview in which contemporary Haitian vodou music was made possible." (20)
Traduction :
"Malgré mon incapacité à tirer des lignes historiques directes de la musique islamique ouest-africaine vers la musique vodou haïtienne, d'autant plus que l'islam ne possède pas de musique sacrée universelle, je pense qu'il est important que les érudits comprennent les origines complexes des croyances et des pratiques vodou. ils ont contribué à créer une vision du monde dans laquelle la musique vodou haïtienne contemporaine a été rendue possible."
Faute de preuve, Jon Bullock suit la route préférée des révisionnistes qui celle de bombarder son article de ressemblances fortuites entre l'islam et des éléments disparates de la culture haïtienne.

Devant pareilles bêtises, on ne peut que se demander si ces intellos se rendent compte que le continent "africain" a connu une version proche du jeu d'échec depuis environ 3500 ans avant l'ère chrétienne, et plusieurs millénaires avant la Perse? Ne savent-ils pas que les Anciens Égyptiens (les Kemit) jouaient au Senet dans la vie quotidienne?


(La Reine Nefertari jouant au Senet)
Source : Peinture tombale de la Reine Nefetari (1295-1255 ans avant l'ère chrétienne) ; https://fr.wikipedia.org/wiki/Senet#/media/File:Maler_der_Grabkammer_der_Nefertari_003.jpg

Et même dans l'au-delà, ces Anciens Égyptiens jouaient au Senet (Sn.t) qui signifie "passage, porte" dans leur langue :

(La Déesse Ani jouant au Senet dans l'au-delà)
Source : Livre des Morts égyptien, Chapitre 17 ; 1600 ans avant l'ère chrétienne (British Musem) ; http://www.bkgm.com/books/JacobyCrawford/HistoryOfBG/pics/photo-2.jpg


(Ensemble de jeu Senet appartenant à la Reine Hatchepsout)
Source : Jeu Senet d'Hatchepsout ;1479-1457 avant l'ère chrétienne (Musée du Louvre)  ; https://fr.wikipedia.org/wiki/Senet#/media/File:Jeu_de_S%C3%A9net.JPG


(Ensemble de jeu Senet dans la tombe du Roi Amenhotep III)
Source : Jeu Senet dans la tombe d'Amenhotep III (Brookly Museum) ; https://fr.wikipedia.org/wiki/Senet#/media/File:P9210016.JPG

Comme chez les Anciens Égyptiens, pour les Dogons du Mali, le damier était intimement lié à la mort. Mais plus que cela, cette forme mystique structurait leur existence dans son entièreté : la généalogie religieuse, l'architecture, l'urbanisation, l'agriculture, l'art,  l'habillement, etc. :










 
 
(La forme du damier dans la vie des Dogons, au Mali)
Source : Marcel Griaule. Dieu d'eau: Entretiens avec Ogotemmêli. Paris, 1975.

Ceci dit, nous n'avançons pas de liens généalogiques, ni religieux entre les Dogons et les Haïtiens. Car, ni les archives coloniaux, ni la mémoire haïtienne ne relèvent de références dogon. Certes, les peuples limitrophes des Dogons, tels que les Bozo, les Peuls (Foula en Créole), et les Bambara (Banmbara en Créole), ont laissé une empreinte en Haïti.


(Cartes du territoire des Dogon)
Source : Marcel Griaule. Dieu d'eau: Entretiens avec Ogotemmêli. Paris, 1975.  

Ainsi, en absence de preuve, nous n'attribuerons pas le damier haïtien à un héritage dogon. Le point que nous défendons ici, est que les carreaux et les losanges sont extrêmement répandus comme symboles en "Afrique" traditionnel.






(Damier chez les Vagla du Ghana)
Source : Christoph Henning, Klaus E. Müller, Ute Ritz-Müller. Afrique-La magie dans l’âme : rites, charmes et sorcellerie. Könemann, 2000. p.379.






(Damier chez les Yoruba/Nago du Nigeria)
Source : Robert Farris Thompson. African Arts in Motion : Icon and Act... London, 1974. pp.98-99.
 
Voilà l'existence de carreaux, sans pour autant que l'islam ait pénétré ces coutumes traditionalistes préalablement. Dans l'article précédent sur les vèvè, nous avons d'ailleurs présenté des annonces traitant de captifs Congo (zone peu ou pas exposé à l'islam) ayant des carreaux comme marques tribales.

6- Les losanges et l'art divinatoire musulman?

Voici ce tableau (non cérémoniel) du peintre traditionaliste haïtien Gérard Valcin :


Source : Gérard Valcin. "Cérémonie dans un temple vaudou", 1963 ; Milwaukee Art Museum ; https://hiveminer.com/Tags/art,haitian

LeGrace Benson s'en inspira pour affirmer que les tuiles en forme de carreaux et de losanges qui s'y trouvent prouvent l'influence de l'art divinatoire islamique dans la religion haïtienne :
"The Valcin painting and the mandala each exemplify signs used to point to vast, complicated events and to relationships between ordinary humans and transcendent forces observed to work on and through them. In the Haitian example, the checkered pattern is almost certainly more than just a stylish background. It looks like the familiar game board, which is in turn a destiny board: the magic squares of Islamic divination." (21)
Traduction :
"La peinture de Valcin et le mandala illustrent chacun des signes utilisés pour désigner des événements vastes et complexes et des relations entre les humains ordinaires et les forces transcendantes observées pour travailler sur et à travers eux. Dans l'exemple haïtien, le motif à carreaux est presque certainement plus qu'un simple fond élégant. On dirait le plateau de jeu familier, qui est à son tour un plateau de destin: les carrés magiques de la divination islamique."
Vu que le tableau de Valcin n'est qu'artistique et non un objet utilisé dans les services traditionnels, la comparaison de Benson est donc nulle. L'artiste peintre avait donc toute la latitude de transposer ce qui lui plait dans son oeuvre. D'ailleurs, le plancher représenté est fantaisiste, car aucun hounfò ou temples sacrés traditionnels ne possède des planchers, ou même muraux, ainsi décorés. Mais, pour être "fair play", faisons semblant que le travail de Valcin soit un objet liturgique ; un drapeau sacré, par exemple. Et poursuivons l'exercice.

Voici le "khawatim", l'art divinatoire musulman mentionné, qui se formule dans ce schéma composé de carreaux et de losanges :


Source : Sulaymān ibn Aḥmad. Explication de l'œuvre d'al-Ghazali et de Nuh ibn al-Tahir al-Fulani. Tombouctou, 1800. p.21 ; Lien permanent : https://www.wdl.org/fr/item/467/view/1/21/


Source : http://kisawung.blogspot.ca/2007/12/khawatim-at-taubah.html?m=1


Source : https://manojdev1.wordpress.com/2015/08/24/protection-totale/

Il existe effectivement une certaine ressemblance entre les tuiles de la peinture haïtienne et l'élément magique musulman présenté. Cependant, rien n'indique un lien de filiation entre ces 2 entités. D'ailleurs, 1- cet art divinatoire musulman est inconnu en Haïti, pays absorbant pourtant une panoplie de pratiques magiques venues d'ailleurs. 2- Et le mot "khawatim" n'apparait sous aucune forme (dérivée ou directe) dans le corpus linguistique haïtien.
Donc, sans aucun de ces facteurs, l'affirmation de LeGrace Benson demeure que de la spéculation. D'autant plus qu'il existe d'avantage de similitudes dans le tableau de Valcin avec le Ndut, cet objet initiatique que les traditionalistes sérères du Sénégal transportaient sur la tête :


(Ndut, objet initiatique sérère au Sénégal)
Source : https://en.wikipedia.org/wiki/Pangool#/media/File:Serer_Religious_Ceremony.jpg


Source : Gérard Valcin. "Cérémonie dans un temple vaudou", 1773 ; Milwaukee Art Museum ; https://hiveminer.com/Tags/art,haitian

Bien entendu, les révisionnistes islamiques trouvent guère d'intérêts dans l'apport traditionnel (ou pré-islamique) dans les symboles sacrés ou profanes haïtiens. Mais nous verrons plus bas l'origine exact des losanges dans le rituel haïtiens.


7- Les carreaux et losanges et l'héritage Ibo

De même LeGrace Benson prend les drapeaux-rituels en référence à celui-ci représentant Saint Jacques :
(Drapeau cérémoniel haïtien représentant Saint Jacques)
Source : LeGrace Benson. "Some Breton and Muslim Antecedent of Voudou Drapo". In : Textile Society of America Symposium Proceedings Paper 867. 1996.

Ainsi, selon la révisionniste, quoique des icônes semblables ont été décelés dans des bannières militaires françaises, la tradition haïtienne ne peut les puiser que dans des amulettes de guerre islamiques :
"The drapo motifs that show the strongest visual congruencies with Islamic designs are the repeated squares, often diagonally divided, as borders, especially for Sin Jak drapo. (...) Motifs other than the magic squares also appear; for example, exact replicas of Islamic divination symbols appear on drapo for Sin Jak." (22)
Traduction :
"Les motifs de drapo qui montrent les congruences visuelles les plus fortes avec des conceptions islamiques sont les carrés répétés, souvent divisés en diagonale, en tant que frontières, particulièrement pour les drapo Sin Jak. (...) Des motifs autres que les carrés magiques apparaissent également; par exemple, des répliques exactes de symboles de divination islamiques apparaissent sur les drapo  de Sin Jak."
Puisse qu'il faut analyser l'islamité de cet icône, alors, faisons le sérieusement. Le fait même qu'une représentation humaine soit considérée comme sacrée va à l'encontre de l'islam qui interdit cela. De plus, pourquoi donc cet icône représentant un saint catholique ayant vaincu des envahisseurs musulmans, serait une preuve d'islamité? Cela ne tient pas la route.


D'autant plus, les icônes de ce type se retrouvent en abondance chez les traditionalistes "africains" ; et sont antérieur à l'islam. Nulle besoin d'extrapoler comme un révisionniste, nous avons les preuves. Prenons l'exemple des Igbo du Sud-Est du Nigeria et du Sud-Ouest du Cameroun actuels :


(Officiants dans une Maison sacrée Ibo ou Igbo House aux symboles sacrés)
Source : Robert Farris Thompson. African Art in Motion : Icon and Act in the Collection of Katherine Coryton White. Berkeley, 1974. p.186.

Ici, l'un des officiants Ibo (Ibibio) assis dans la maison Ngbe, porte l'icône en question qui s'intègre parfaitement avec le décor. Cet icône est l'un des signes de l'écriture non syllabique Ibo nommée Nsibidi :
Source : Robert Farris Thompson. African Art in Motion : Icon and Act in the Collection of Katherine Coryton White. Berkeley, 1974. p.181.

Il s'agit donc du signe de la multiplication des tâches du léopard, l'animal emblématique des Ekpe, c'est-à-dire les sociétés secrètes de Léopard chez les Ibo ; plus particulièrement chez le sous-groupe Ibibio.


(Membres d'une société secrète Léopard Ekpe)
Source : Percy Amaury Talbot. In the Shadow of the Bush. London, 1912. p.42-43.


(Signes Nsibidi Ibo dans les vêtements appelés Ukara)

(Membres d'une société Léopard Ekpe décorés à l'aide des Nsibidi)
Source : https://www.pinterest.ca/pin/188729040612443671/


(Membres d'une société Ekpe appliquant les losanges sur des bâtons imoro)
Source : Dr. Simon Ottenberg, 1960 ; Lien permanent : http://collections.si.edu/search/tag/tagDoc.htm?recordID=siris_arc_275011


(Signes Nsibidi Ibo tracés sur le sol, photographiés en 1900)
Source : https://en.wikipedia.org/wiki/Odinani#/media/File:Ogbo_Obodo.jpg

Cette écriture Nsibidi inspira les signes anaforuana des traditionalistes cubains, membres des sociétés secrètes Abakuá :


(Signes afro-cubains anaforuana issus du nsibidi)
Source :  http://ukpuru.tumblr.com/post/110636872592/cuban-abakua-and-the-cross-river-abakua-or-abaku%C3%A1

Et bien entendu, l'écriture Nsibidi contribua (partiellement) dans les vèvè haïtiens :




(Vèvè du Lwa Ibo Lele en Haïti)
Source : Milo Rigaud. Ve-Ve : Diagrammes Rituels du Voudou. New York, 1974. p.351.

Voici d'autres Vèvè pour Ibo Lele et Ibo Swaman dotés des losanges emblématiques Ibo comme étendards :
 
(Vèvè de Ibo Lele en Haïti)
Source : Milo Rigaud. Ve-Ve : Diagrammes Rituels du Voudou. New York, 1974. p.352.
(Vèvè de Ibo Swaman en Haïti)
Source : Milo Rigaud. Ve-Ve : Diagrammes Rituels du Voudou. New York, 1974. p.354.

Ces symboles Ibo Nsibidi datent, au plus tôt, de l'an 400. Par conséquent, ils précèdent de 500 ans la date de l'an 900 à laquelle les révisionnistes ont suggéré que les musulmans pouvaient avoir exposé les "Africains" à des bannières comportant des signes d'échécier (damier ou carreaux). L'auteur Robert Farris Thompson aborde dans ce même sens :
"Nsibidi do not derive from Western writing systems. There are no Arabic or Latin letters in the script. It is wholly African. (...) The moral and civilizing impact of nsibidi betrays the ethnocentrism of an ideology that would exclude ideographic forms from consideration in the history of literacy. Educated Western persons continue to assume that black traditional Africa was culturally impoverished because it lacked letters to record its central myths, ideals, and aspirations. Yet the Ejagham and Ejagham-influenced blacks who elaborated a creole offshoot of nsibidi in Cuba have proven otherwise." (23)
Traduction :
"Le nsibidi ne dérive pas des systèmes d'écriture occidentaux. Il n'y a pas de lettres arabes ou latines dans cette écriture. Elle est entièrement africaine. (...) L'impact moral et civilisateur de nsibidi trahit l'ethnocentrisme d'une idéologie qui exclurait les formes idéographiques de l'histoire de l'alphabétisation. Des personnes occidentales éduquées continuent de supposer que l'Afrique traditionnelle noire était culturellement appauvrie parce qu'elle manquait de lettres pour enregistrer ses mythes, idéaux et aspirations. Pourtant, les Noirs Ejagham et ceux influencés par Ejagham qui ont élaboré une dérivée créole du nsibidi à Cuba ont prouvé le contraire."


8- L'héritage Ibo en Haïti

Bien entendu, les Ibo constituent une nation ou nanchon dans le rituel haïtien. Et le sous-groupe Ibibio fut connu dans la colonie de Saint Domingue sous diverses nominations, notamment : Ibo, Bibio, Bibi, Bibis, Ibo-Bibi, Calaba, Calabari, etc.


"Un Negre nouveau, nommé Azor, nation Bibio, âgé de 12 à 14 ans, ayant des marques de son pays sur les tempes, de grands yeux, de longues paupieres & grosses levres, appartenant à Mde veuve Yvon, au Cap, est parti maron le 4 de ce mois. Il y aura récompense pour ceux qui le rameneront." (24)
Mais les Ibibio sont vénérés dans le rituel traditionnel haïtien sous l'appellation de Ibo Bibi ; qui représente un sous-groupe de la Nation sacrée ou Nanchon Ibo. 6 ans avant la cérémonie révolutionnaire du Bois Caïman, cet arrêt du Conseil du Port-au-Prince du 3 juin 1785 concerne César, un captif de nation Ibo Bibi ayant commis un meurtre :


"Par ce Procès-verbal il est constaté qu'il a été impossible de trouver une personne qui pût servir d'interprètre à un Nègre de nation Ibo-bibi. Ce Nègre, nommé César, accusé de crime capital, a été livré dans les mains de la justice." (25)
Ainsi, en Haïti, la filiation Ibo/Ibibio est nette et précise. Et cet arrêt de justice témoigne que les Ibo, réputés mélancoliques et suicidaires dans la colonie de Saint Domingue, (26) étaient tout autant dangereux. D'ailleurs, les sociétés secrètes léopards dont certains d'entre eux furent membres, étaient de caractère agressive.
Alors, la contribution Ibo à la Révolution haïtienne est sans équivoque. Et les Ibo et leurs sous-groupes Ibibio étaient traditionalistes autant que leurs signes rituels qui, un peu à la manière des vèvè haïtiens, étaient également tracés sur sol :




(Vèvè : Dessin-rituel haïtien avec des damiers sur un corps d'animal)
Source : Milo Rigaud. La Tradition Voudoo et le Voudoo Haïtien. Paris, 1953. fig.15. p.128.

Mais l'influence Ibo s'étend au-delà des vèvè. Elle est marquée par les cruches sacrées Ibo, le service annuel du Manje yanm** (célébration en fin novembre de la récolte du yam), et également par la référence à Ibo granmoun lakay li (Ibo est adulte chez lui) :


(Maison Ibo au Nigeria)
Source : Percy Amaury Talbot. In the Shadow of the Bush. London, 1912. p.216.

Car le culte Ibo traditionnel étaient ancré sur les Igbo Houses, ces Maisons sacrées, appelées Lakay Ibo symboliquement en Haïti, ou souvent cet ensemble de Maisons sacrées (Compound) appelée Lakou en Haïti. De là ressort le chanson sacré haïtien référant à la demeure de Ibo :


Ibo granmoun o, o granmoun o
Lakay Ibo, Ibo granmoun o
Traduction :
Ibo est adulte, oui adulte
Ibo est adulte (maître) chez lui.

Dans le Igboland (Sud-Est nigérian et Sud-Ouest camérounais), le pilier central (Okenze Agwu) de ces Maisons de culte était particulièrement important. Il représentait l'un des 4 éléments les plus sacrés (Okenze) que seulement un Dibia (un grand officiant) en très bon standing avec la Divinité Agwu aura l'autorisation divine de l'installer dans sa maison de culte (27) :


(Pilier central Ibo comportant les damiers sur un corps d'animal, au Nigeria)
Source : Percy Amaury Talbot. In the Shadow of the Bush. London, 1912. p.25.




(pilier central Ibo décoré sur le socle, au Nigeria)
Source : Zbigniew Dmochowski ; http://www.nairaland.com/1005808/igbo-architecture-ulo-ome-nigbo/4

Voilà le même pilier sacré Ibo, nommé potomitan dans la tradition haïtienne :


(Potomitan/pilier central décoré sur le socle, en Haïti)
Source : Milo Rigaud. La Tradition Voudoo et le Voudoo Haïtien. Paris, 1953. p.240. 

Et voici un schéma montrant les damiers et le potomitan (représenté par un cercle du milieu) :


Source : Milo Rigaud. Ve-Ve : Diagrammes Rituels du Voudou. New York, 1974. p.209.

La tradition Ibo possède sa propre culture de cercle doté d'un point central (potomitan), appelé ici Juju Circles :


(Cercle Juju à Oban)
Source : Percy Amaury Talbot. In the Shadow of the Bush. London, 1912. p.10-11.

Ce qui nous amène au point complémentaire suivant : les rotations autour du potomitan dans la tradition haïtienne.


9- Les rotations dans le sens contraire de la montre et le relais des falsificateurs

Les révisionnistes attribuent les rotations que font les traditionalistes haïtiens autour du potomitan (ou tout autre élément) à l'islam, et aux rotations que font les pèlerins musulmans autour de la kaaba. La kaaba étant, disent-ils, une roche tombée du ciel (ou du paradis). Elle était, toujours selon leur récit, de couleur blanche parce que jugée pure, et qu'elle serait devenue noire à cause du péché d'Adam. Là un concept anti-noir qui est incompatible avec la religion traditionnelle haïtienne.
De plus, le mot "kaba" veut dire "mourir, terminé, en finir avec", en Créole haïtien. Il ne réfère nullement à une roche, comme c'est le cas dans l'islam. Regardons de plus près.

À défaut d'asseoir leurs arguments sur des preuves directes, les révisionnistes islamistes, tels des avocats verreux, mettent de l'avant un tas d'éléments circonstanciels. Dans l'accomplissement de cette tâche de déception, ils fonctionnent par relais. Le premier traitant d'un point, généralement, se contentera d'insinuer une relation entre la religion haïtienne avec l'islam ou avec les pratiques des Amérindiens taïno. Puis, les générations suivantes de "chercheurs" révisionnistes prendront le relais :

1) La plupart du temps, les relayeurs reprennent comme factuelles, les faussetés insinuées par d'autres révisionnistes. C'est le cas de Jon Bullock qui cita tel un "fait" une simple affirmation que LeGrace Benson n'a jamais démontré :
"The search for a historical understanding of Islam in Haiti (colonial Saint-Domingue) must naturally begin in West Africa, where Islam was incorporated into local belief systems centuries before the arrival of Christianity. By the time of the Middle Passage, both religions had made an impact on West Africans, enough so that, in the words of LeGrace Benson, “Qur’an and Bible traveled on the ships bound from Africa to St.-Domingue.” The value of this fact lies in its potential to render common ideas about “African tribal religions” as demarcating one end of a religious continuum untenable." (28)
Traduction :
"La recherche d'une compréhension historique de l'islam en Haïti (Saint-Domingue coloniale) doit naturellement commencer en Afrique de l'Ouest, où l'islam a été incorporé dans les systèmes de croyances locaux des siècles avant l'arrivée du christianisme. À l'époque du Passage du Milieu, les deux religions avaient eu un impact sur les Africains de l'Ouest, assez pour que, selon les mots de LeGrace Benson, «le Coran et la Bible voyagent sur les bateaux reliant l'Afrique à Saint-Domingue». La valeur de ce fait réside dans son potentiel à rendre intenables des idées communes sur les «religions tribales africaines» comme délimitant une extrémité d'un continuum religieux intenable."
Dans quel ouvrage ou dans quelle pièce d'archive est-ce LeGrace Benson a jamais découvert la référence d'un captif (esclave) transportant avec lui soit une bible, soit un coran, dans un bateau négrier? Si cela existe, que quelqu'un nous le présente. LeGrace Benson l'a certainement jamais trouvé en plus de 25 ans de recherche supposément scientifique. Et je doute fort que Jon Bullock, son disciple, puisse trouver cette fameuse référence durant les 25, voir les 50 prochaines années.

2) À d'autres moments, ce relais s'opère avec d'avantage de subtilité :
a) Ils constatent que les rotations des traditionalistes autour des potomitan, dans le sens contre d'une montre ; et que cela coïncide avec les rotations des pèlerins musulmans autour de la kaaba (une sorte de roche noire). Cependant, rien de tangible ne rattache cette pratique haïtienne à l'islam.
b) Le premier qui approche une pratique haïtienne se fera donc prudent. C'est ici le cas des révisionnistes Benjamin Hebblethwaite et Michel Weber qui insinuèrent le rapprochement à l'islam qu'ils savent pertinemment infondé. Mais, ils camouflent leur manège en soulignant que diverses autres religions faisaient de telles rotations, et qu'un fond commun "africain" pourrait être responsable des similitudes dans les pratiques religieuses :
"Circumambulation in Haitian Vodou : This similarity between Arabian religion, Islam, and Haitian Vodou deserves far more research. Furthermore, additional religious traditions should be included in comparative approaches. Clockwise circumambulation is also important in forms of Hindu ceremonial ritual (personal communication Jaya Reddy). The phenomenon of ritual cycles reflects a fundamental form of human worship and stands as a good candidate as a trace element surviving from deep antiquity. We hypothesize that dance around fires was the origin of this ritual circumambulation. Given the “serial founder effects” of our languages phonologically (Atkinson 2011), analogous serial founder effects should occur in a model of the expansion of religion from Africa. We hypothesize that circumambulation represents a serial founder effect that impacts several world religions. Circumambulation is comparable to a ripple spreading outward from the African core." (29)
Traduction :
"Circumambulation dans le vaudou haïtien : Cette similitude entre la religion arabe, l'islam et le vaudou haïtien mérite beaucoup plus de recherches. En outre, d'autres traditions religieuses devraient être incluses dans les approches comparatives. Circambulation dans le sens des aiguilles d'une montre est également important dans les formes de rituel rituel hindou (communication personnelle Jaya Reddy). Le phénomène des cycles rituels reflète une forme fondamentale du culte humain et constitue un bon candidat en tant qu'élément trace qui survit à l'antiquité profonde. Nous émettons l'hypothèse que la danse autour des feux était à l'origine de cette circumambulation rituelle. Étant donné les «effets fondateurs en série» de nos langues sur le plan phonologique (Atkinson 2011), des effets de fondateur en série analogues devraient se produire dans un modèle d'expansion de la religion à partir de l'Afrique. Nous émettons l'hypothèse que la circumambulation représente un effet fondateur en série qui affecte plusieurs religions du monde. Circumambulation est comparable à une ondulation qui s'étend à l'extérieur du noyau africain."
c) Le relais malhonnête se fera donc par le "chercheur" suivant, un certain Jon Bullock, qui, sachant que peu se soucieront de vérifier à la source, citera le propos prudent d'Hebblethwaite et de Weber comme tel d'un fait prouvant l'influence islamique dans le rituel haïtien :
"Finally, it may be helpful to search for remnants of Islamic thought within the general principles organizing the practice of Haitian vodou music as ritual. According to Hebblethwaite and Weber:
"In Vodou, each salutation to a spirit requires a specific circumambulation ritual, accompanying drumming, songs, and ritual leadership from priests and priestesses who shake the ason (shaker) and form the center of the choreographed worship. Just as practitioners of Arabian religion circumambulated the Kaaba and their home shrines in a counterclockwise motion, in Vodou the worshippers also rotate the potomitan (center post) counterclockwise."" (30)
Traduction :
"Enfin, il peut être utile de rechercher les restes de la pensée islamique dans les principes généraux organisant la pratique de la musique vodou haïtienne comme rituel. Selon Hebblethwaite et Weber:
"Dans le vodou, chaque salut à un esprit exige un rituel de circumambulation spécifique, accompagnant le tambourinage, les chants, et le leadership rituel des prêtres et des prêtresses qui secouent l'ason (shaker) et forment le centre du culte chorégraphié. la Kaaba et leurs sanctuaires dans le sens inverse des aiguilles d'une montre, dans le Vodou, les fidèles tournent aussi le potomitan (poste central) dans le sens inverse des aiguilles d'une montre.""
Bien entendu, Jon Bullock, le révisionniste coupera court à la citation d'Hebblethwaite et de Weber afin de ne pas présenter les propos suivants qui évoquent une multitude de points de divergence entre la rotation haïtienne et celle de l'islam :
"In the course of the counterclockwise circumambulations that characterize Vodou’s “danced and choreographed worship,” Vodou priests and priestesses also salute “stations” within the Vodou temple in the course of their many circumambulations. These stations of salutation include the greeting of the cardinal directions, the drums and the drummers, the potomitan, the door to the altar room, the audience itself, and finally the greeting of the priest who will lead the following ritual cycle. The greetings are typically hugs, the touching of foreheads, and three back-to-back rotations. Other greetings involve full prostrations and kneeling. Indeed, the macrocosmic circular motion around the potomitan is mirrored in the many microcosmic circular aspects within Vodou ritual, especially greetings between Vodouists.
The circling of a sacred axis mundi is a fundamental dimension of Arabian religion, Islam, and Haitian Vodou—in each case, practitioners circumambulate a central symbol and conduit of spiritual power. In the context of the recent African single-origin hypothesis, it is conceivable that this primal ritual is tens of thousands of years old and reflects a deep religious structure once shared in a prototypical form by common African ancestors."" (31)
Traduction :
"Au cours des circumambulations dans le sens anti-horaire qui caractérisent le «culte dansé et chorégraphié» de Vodou, les prêtres et les prêtresses vaudou saluent également les «stations» du temple Vodou au cours de leurs nombreuses circumambulations. Ces stations de salutation comprennent la salutation des directions cardinales, les tambours et les tambours, le potomitan, la porte de la salle de l'autel, le public lui-même, et enfin la salutation du prêtre qui dirigera le cycle rituel suivant. Les salutations sont typiquement des câlins, le contact des fronts, et trois rotations dos-à-dos. D'autres salutations impliquent des prosternations complètes et agenouillées. En effet, le mouvement circulaire macrocosmique autour du potomitan se reflète dans les nombreux aspects circulaires microcosmiques au sein du rituel vodou, en particulier les salutations entre les vodouistes.
L'encerclement d'un axe sacré mundi est une dimension fondamentale de la religion arabe, de l'islam et du vaudou haïtien. Dans chaque cas, les pratiquants circambulent autour d'un symbole central et d'un conduit de pouvoir spirituel. Dans le contexte de la récente hypothèse africaine d'origine unique, il est concevable que ce rituel primitif ait des dizaines de milliers d'années et reflète une structure religieuse profonde autrefois partagée sous une forme prototypique par des ancêtres africains communs.""
Mais, fort malheureusement pour ce troupeau de révisionnistes :
  1. Les rotations circulaires des traditionalistes haïtiens se faisaient non seulement autour du potomitan, mais également autour d'autres éléments importants du rituel. Ce qui n'est pas le cas de la pratique musulmane.
  2. Les hommes et les femmes se mélangent durant ces rotations circulaires. Élément interdit par l'islam.
  3. Ces rotations circulaires, souvent contiennent de l'alcool. Ce que l'islam interdit.
  4. Ces rotations circulaires ne faisaient pas uniquement dans le sens contraire de la montre. Au cours de plusieurs cérémonies, elles vont également dans le sens contraire, c'est-à-dire dans le sens de la montre. Ce qui n'est pas le cas dans l'islam.
  5. Fort souvent, ces rotations vont dans les 2 directions successivement. Encore, ce qui n'est pas le cas dans l'islam.
  6. Les rotations se font au son des chants sacrés et du tambour, ce qui n'est pas le cas dans l'islam.
  7. Lors de la célébration du tambour Asòtò, les pratiquants peuvent parfois tenir chacun une baguette (tige) pour battre symboliquement ce tambour géant autour duquel ils tournent. Là une pratique n'ayant aucun lien avec l'islam, et même contraire à l'islam.
  8. La couleur des vêtements n'est pas obligatoirement blanche, comme c'est le cas dans l'islam.
  9. Les pratiquants ne sont pas forcément des pèlerins, comme le sont les musulmans en rotation.
  10. etc.
Voici des captures d'images au cours d'une cérémonie traditionnelle haïtienne qui illustrent nos points. On y remarque plusieurs des points non islamiques soulevés ; à savoir le mélange d'hommes et de femmes, la tige à la main, et,
  • a) les rotations s'effectuent dans le sens contraire de la montre,
  • b) sous le signal du Serviteur étonnant les chants sacrés, le changement de direction rapide s'opère ;
  • c) les rotations se font alors dans le sens de la montre :
a)
(Rotations dans le sens contraire d'une montre, lors d'une cérémonie traditionnelle haïtienne)

b)
(Changement de direction rotatoire soudaine, lors d'une cérémonie traditionnelle haïtienne)

c)


(Rotations dans le sens d'une montre, lors d'une cérémonie traditionnelle haïtienne)
Source : "‪Cérémonie Assotor à Souvenance‬". ; Lien permanent : https://www.youtube.com/watch?v=nAruC6k2XEE

Et les changements de directions se répètent plusieurs fois au cours de la cérémonie.


9.1- Les rotations et l'ethnie Moundang

Non pas l'islam, mais la tradition Moundang peut bien être l'une des sources de la rotation dans le rituel haïtien. Dans la colonie française de Saint Domingue, il se trouvait des captifs (esclaves) de l'ethnie Moundang du Cameroun et du Tchad. On les nommait Mondongues :


"Cinq Negres nouveaux, dont trois Nègres Mondongues, & deux jeunes Négresses Congo, étampés D.BUTLER, sont marons depuis le 8 de ce mois. Mr. Bocher, Procureur de Mde. de Butler à qui ils appartiennent, prie ceux qui les reconnaîtront de les faire arrêter & de lui en donner avis sur l'Habitation de ladite Dame au Morne-rouge ; il y aura récompense." (32)
Lors de leurs célébrations religieuses, ces Moundang (ou Mondongues) tout en dansant, font des rotations autour d'un point central, dans le sens contraire de la montre :


 (Danse rotative Moundang)
Source :  "Fing moundan" ; Lien permanent : https://www.youtube.com/watch?v=wdGqYK4U1pw

Mais pourtant, les Moundang sont majoritairement traditionalistes. (33) Et ils l'étaient d'avantage à l'époque esclavagiste. Sous l'appellation "Mondong", "Moudong", "Moundong" ou "Monndong", l'ethnie Moudang (ou Moundan) est divinisée dans le rituel haïtien. La famille de Lwa Mondong se compose de plusieurs Lwa/Jany, dont les suivants : Moundong Mousayi Kann Chèch o, Mousanmbe, Ti Moundong, Towawa, Mousayi Moundong, etc.
Voici le vèvè symbolique des Lwa Mondongues en Haïti :


(Vèvè du Lwa Moundong Masay en Haïti)
Source : Milo Rigaud. Ve-Ve : Diagrammes Rituels du Voudou. New York, 1974. p.562.

Maintenant, observons la photo d'un chien en pays Moundang, au début du 20e siècle chrétien :




(Un chien Moundan, Cameroun)
Source : Eugène Brussaux, Étienne Muston. Album de la Mission Moll, 1905-1907, Congo, Oubangui-Chari, Tchad, Cameroun. 201 phot. Enregistré en 1924. ; cliché We-260-152.

Sans être entièrement identique, on peut tout de même déceler un trait de ressemblance dans les 2 physionomies canines ; notamment dans la position élevée de la queue, la minceur du ventre, la forme du crâne et des pattes. Sans référence écrite, et éloignés de plusieurs siècles de la source "africaine", les traditionalistes haïtiens ont, tant bien que mal, conservé l'allure générale du chien Moundang.


9.1.1- Pourquoi le chien comme symbole?

Tout d'abord, les Moundang possèdent un Dieu Créateur de sexe féminin (à la limite androgyne). Elle se nomme Masin. Ce qui signifie "Celle qui est en haut, dans le ciel". (34) Mais cette Déesse Créatrice étant lointaine, (35) les Moundang, pour leurs besoins spirituels, font appel à la Royauté divinisée (Gõn), aux Esprits ancestraux (Syinri), et aux animaux totémiques (serpent, buffle, oiseaux, singe, chien, grenouille, etc.) de plusieurs clans.
Les Moundang s'établissent une multitude de clans structurés de manière officieuse. Et plusieurs de ces clans s'identifient et se nomment en fonction de leur totem spécifique :
  • Ban se (clan du Buffle)
  • Ban ju (clan des Oiseaux) 
  • Ban guo ou Bane Soo (clan du Chien) 
  • Ban suo (clan du Serpent) 
  • Ban su « clan du Fil » ou (clan de la Fibre du cannabis) 
  • Ban ping ni (clan du Singe)
  • Ban balé (clan du Lion)
  • Ban pin (clan de la Panthère)
  • etc.
Il existe des raisons particulières et variées pour l'identification à chaque totem. Par exemple, pour le buffle, c'est la force. Quant au chien, les Moundang retiennent la férocité guerrière et la rage meurtrière qu'ils associent aux chiens à "gueule rouge", (36) (de sang et de rage). Mais, l'identification totémique au chien féroce ne reste pas confinée aux clans du chien "Ban Guo" ou "Bane Soo". Elle s'étend à l'ensemble du peuple Moundang qui se voient protecteurs du clan à la manière d'un chien-tueur agressant les preneurs d'esclaves.
Ainsi, à Saint Domingue/Haïti, le chien féroce et protecteur s'est révélé l'archétype de peuple Moundang. Et les Lwa Mondongues prenant possession du corps des pratiquants agissent tels de véritables "chiens enragés" à la poursuite de leur proie (dont des chiens). Car, chez les Moundang, au cours de services religieux ou dans des lieux spécifiques, l'Esprit d'un animal totémique peut occuper le corps d'un individu dont il est le totem. (37)


9.1.2- Mondong Masay /  Mousay et la révision islamique

Le mot "Masay" dans "Mondong Masay" est également victime de la révision islamique. Car, dans le rituel haïtien, le mot "Masay" se présente sur diverses formes : "Masay", "Mousay" ou "Mousayi". Le révisionniste Bebe Pierre Louis prétend que "Mousayi", provient de Kankan Moussa, le nom d'un Roi mandingue islamisé  :
"Lwas like Kongo Mousayi refer to the famous Kango Moussa usually and wrongly referred to as Kankan Moussa, who was Islamic." (38)
Traduction :
"Les Lwas tels Kongo Mousayi font référence au fameux Kango Moussa, que l'on appelle à tort Kankan Moussa, qui était islamique."
L'argument révisionniste ne tient pas la route, pour plusieurs raisons :
a) La plus élémentaire des raisons étant qu'à Saint Domingue, il se trouvait des captifs (esclaves) traditionalistes tels les Bambara portant le nom de "Moussa" :


"Moussa dit Simon, Bambara, étampé I.B. & XX au-dessous, âgé d'environ 47 ans, taille d'environ 5 pieds 2 pouces; d'une assez faible constitution, ayant plusieurs marques de son pays au visage, & les dents pointues, marron depuis le 15 ou 20 décembre dernier, appartenant à l'habitation Baujau du Quartier Morin." (39)
b) On doit se demander, si le révisionniste haïtien Bebe Pierre Louis est même au courant qu'il existe en Haïti, un plat traditionnel nommé moussa (mousa en Créole)? Je me permets d'en douter. D'ailleurs, le plat moussa ne fait pas non plus référence à l'islam, car dans la colonie de Saint Domingue, il consistait l'une des nourritures servies à la Couleuvre sacrée ; là une pratique nettement contraire à l'islam :


"... me conduisit à leur rassemblement, et je vis adorer, devant un gros mapou creusé par le temps, une couleuvre qui y faisait sa résidence, et à laquelle, dans l'intervalle des prières, on apportait de quoi se nourrir, en viande, poisson, moussa, calalou, et surtout du lait..." (40)
c) Les mots "Masay", "Mousay" ou "Mousayi"*** font plutôt référence à l'ethnie traditionaliste Massa qui est voisine des Moundang à la frontière camerouno-tchadienne ; c'est-à-dire entre le Sud-Ouest du Cameroun et le Nord-Est du Tchad :


(Emplacement des ethnies Moundang et Massa, entre le Tchad et le Cameroun (en noir))
Source : Agence économique des territoires africains sous mandat. Togo Cameroun Paris, 1934. p.86.

Voici maintenant des timbres tchadiens de 1972 représentants leurs ethnies Moundang et Massa :


(Soldat Moundang)
Source : https://www.hipstamp.com/listing/chad-278-moundang-warrior-cto-nh/2839343


(Soldat Massa)
Source : https://www.hipstamp.com/listing/chad-277-cto-15fr-massa-warrior-1972/16898575

Donc, ce ne fut point hors-norme qu'une certaine fusion religieuse s'est développée en Haïti, entre les Mondongues et les Massa, deux ethnies traditionalistes voisines. D'ailleurs, c'est ridicule de suggérer une origine islamique au mot "Masa" et ses dérivés, puisque les Massa, autant que les Moundang, furent capturés par leurs voisins islamisés (Baguirmi et Peul) qui ne cessèrent de les persécuter en raison de leur religion. (41) Et ce ne fut jusqu'à au début 1900, par l'intervention militaire des colons européens (allemands et français), que les islamisés ont cessé leurs razzias visant à prendre les Massa (et Moundang) en captivité à chaque saison sèche. (42)
Il faut aussi préciser que les Massa furent répertoriés à Saint Domingue sur les appellations Gumbai (Gumay) et Magoua (Magaw) :


"À Jacmel, le 1er de ce mois, Pierrot, Nation Magoua étampé sur le sein gauche MORIN, au-dessous GR GVE, taille de 5 pieds, ayant des marques de son pays sur le visage et sur le corps, se disant appartenir à M. Morin, habitant." (43)
Et les Massa honorent, prient et font même des sacrifices au Dieu Créateur qu'ils nomment Lwana, le "Dieu, père des hommes, créateur de l'univers et des fuliana". (44) Les Fuliana (pluriel de Fulla - à ne pas confondre avec l'ethnie Foula ou Peule), sont, pour les Massa, les Divinités intermédiaires qui sont classées "chaudes" ou "froides", en fonction de leur nature belliqueuse. (45) Là une classification que les traditionalistes haïtiens ont retenu de leurs Ancêtres Massa. 



10- Le faux centaure islamique et l'héritage Akan

On dirait bien que la fardeau de la preuve échappe à la révisionniste chevronnée, LeGrace Benson. Celle-ci, dans une publication supposément scientifique, avança avoir vu, quelques part dans la vallée de l'Artibonite, en Haïti, des figurines en terre cuite ayant la forme de ce que les musulmans appellent Al-Burak, c'est-à-dire une jument ailée à tête de femme à l'aide du dos de laquelle Mahomet serait monté au ciel :
"Islam as a religion was utterly stamped out of St.-Domingue and Haiti. Its vestiges remain visible but incomprehensible in a few scattered pieces of vèvè, some designs on a few older dwapo, and perhaps, only perhaps, in the centaur-like terracottas of the Artibonite ressembling beautiful Al-Burak who transported Mohammed to the seventh realm of heaven." (46)
Traduction :
"L'Islam en tant que religion a été complètement effacé de Saint-Domingue et d'Haïti. Ses vestiges restent visibles mais incompréhensibles dans quelques morceaux épars de vèvè, sur quelques dessins de quelques dwapo plus anciens, et peut-être, seulement peut-être, dans les centaures en terre cuite de l'Artibonite ressemblant à la belle Al-Burak qui a transporté Mohammed au septième ciel du paradis."
Voici cette fameuse Al-Burak :

(Représentation d'Al-Burak)
Source : https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Al-Buraf_Hafifa.jpg

Et quoiqu'elle souligna le caractère extrêmement hypothétique de son avancé, en avertissant par "peut-être, seulement peut-être", cela ne l'empêcha pas, dans un article ultérieur de référer comme officiellement musulmane, cette représentation jadis hypothétique. Par cette action, Benson démontra son manque d'honnêteté et de rigueur intellectuelle :
"The Asofo regimental flags from the era when Ghana was a British colony show the checkered pattern in a number of interesting deployments (...) One of the Asofo banners in a traveling exhibition depicts al-Burak. In this case the Islamic influence is unmistakable, as this beautiful mare with the face and streaming hair of a woman is the steed who carried Muhammed to the Seventh Heaven in the Night Journey. She will appear in Haiti." (47)
Traduction :
"Les drapeaux régimentaires Asofo de l'époque où le Ghana était une colonie britannique montrent le damier dans un certain nombre de déploiements intéressants (...) L'une des bannières Asofo dans une exposition itinérante représente al-Burak. Dans ce cas, l'influence islamique est indubitable, car cette belle jument au visage et aux cheveux flottants d'une femme est la monture qui a porté Muhammed au Septième Ciel dans le Voyage de Nuit. Elle apparaîtra en Haïti."
Pour commencer, les bannières Asafo (ou Asofo) appelés "frankaa" ne représentent pas Al-Burak, comme Benson l'indique. Les Asafo sont divers corps militaires Akan (du Ghana) que les Hollandais avaient hiérarchisés aux environs de 1720. Et ces traditionalistes Asafo avaient l'habitude de figurer en image leurs Divinités traditionnelles, leurs rivières, leurs oiseaux et leurs proverbes. (48) Et au contact des colonisateurs (hollandais, puis britanniques), les Asafo ont transféré leurs images symboliques sur des drapeaux et bannières militaires.
"These flags "adorn villages and towns at the time of festivals and funerals… (they were developed by) the warrior groups of the Fante, known as 'Asafo'. As European military organization was adopted, so the identity of an Asafo company was adopted, so the identity of an Asafo company was developed and refined by way of new uniformes, flags and banners." (Peter Adler and Nicholas Barnard. Asafo! African Flags of the Fante. London: Thames and Hudson, 1992, p. 7). The inclusion on this flag of the Union Jack is an example of assimilating prestige from prior British colonial presence." (49)
Traduction :
"Ces drapeaux "ornent des villages et des villes lors de fêtes et de funérailles... (ils ont été développés par) les groupes guerriers Fante, connus sous le nom d''Asafo'. Comme l'organisation militaire européenne a été adoptée, l'identité d'une société Asafo a été adoptée. L'identité d'une société Asafo a donc été développée et affinée au moyen de nouveaux uniformes, drapeaux et bannières." (Peter Adler and Nicholas Barnard. Asafo! African Flags of the Fante. London: Thames and Hudson, 1992, p. 7). L'inclusion du Union Jack [drapeau anglais] dans ce drapeau est un exemple du prestige dans l'assimilation à une présence coloniale britannique antérieure."


Source : Doran H. Ross. "Flag dancing scene, No. 2 Company", Mankesim, Fante, Ghana, 1979 ; Lien permanent :https://africa.uima.uiowa.edu/topic-essays/show/9?start=15


Source : Doran H. Ross. "Asafo banner", Lowtown, Ghana, 1979 ; Lien permanent : https://africa.uima.uiowa.edu/media/photos/show/730?back=topic-essays%2Fshow%2F9%3Fstart%3D17

Ces drapeaux et bannières militaires, n'ayant aucun lien avec Mahomet montant au ciel, illustrent au contraire Shramantin, une Divinité traditionnelle des forêts :


 (Drapeau de la Déesse Shramantin)
Source :  http://www.kendalljenner.fun/hashtags/AntiqueFlag/

L'ethnie Akan demeura traditionaliste très tardivement. Ce ne fut qu'au cours du 20e siècle chrétien qu'elle ait choisi de se convertir. Cependant, elle n'opta pas pour l'islam, mais plutôt pour la conversion chrétienne. Et concernant les formes ayant l'allure d'Al-Burak, elles ne sont que point islamiques, mais occidentales:
"In the discussion of this and two related flags, the following proverb is cited, with the ensuing comments: " 'Will you fly or will you vanish?' [Either way you can't escape us.] This image is inspired by the dragons, griffins, cockatrices and wyverns of Europeans heraldry. The Fante say of this  monster, 'it can fly, it can dig in the ground, it can go anywhere'." (Ibid., pp. 74-75)." (50)
Traduction :
"Dans la discussion de ceci et de deux drapeaux s'y rattachant, le proverbe suivant est cité, avec les commentaires suivants: "Envolez-vous ou périrez-vous? [De toute façon vous ne pouvez pas nous échapper.] Cette image est inspirée par les dragons, les griffons, les cockatrices et les wyverns de l'héraldique des Européens. Le Fante dit de ce monstre, 'il peut voler, il peut creuser dans le sol, il peut aller où il le désire'." (Ibid., pp. 74-75)."



Source : Patricia Harris. "Art, Honour, and Ridicule: Asafo Flags from Southern Ghana" (Royal Ontario Museum) ; Lien permanent : https://www.rom.on.ca/en/exhibitions-galleries/exhibitions/art-honour-and-ridicule-asafo-flags-from-southern-ghana


Source : http://conversationpiecescuag.blogspot.ca/2011/03/exploring-issues-of-authenticity-and.html

Source : https://www.pinterest.de/pin/334673816039983699/


Source : http://www.crwflags.com/fotw/flags/gh_asaf1.html


Source : https://www.sarajo.com/product/fante-asafo-flag-2/


Source : http://tonyminnion.co.uk/clothofgoldarchive/archive/6/inafrica/images/falarge1.html


Source : http://www.crwflags.com/fotw/flags/gh_asaf1.html


Source : https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Brooklyn_Museum_2009.39.1_Asafo_Company_Flag_Frankaa.jpg



Source : https://www.pinterest.ca/jana7400/asafo-flags/


Source : https://www.pinterest.ca/imodara/fante-asafo-frankaa-flags/

10.1 - L'héritage Akan en Haïti

Dans la colonie française de Saint Domingue, on se référait globalement aux captifs (esclaves) de l'ethnie Akan furent nommés : Côte d'Or, Cramenti ou Mina.

a) Côte d'Or
Globalement ces captifs (esclaves) Akan provenant du Ghana actuel furent nommés "Côte d'Or", l'ancien nom de ce pays :


"Pompée, de la côte d'Or, étampé V. MIAILLES, taille ordinaire, ayant des marques de son pays sur le visage & une excroissance qui lui pend à l'oreille; parti marron de l'habitation de Mme Ve Miailles, depuis environ trois mois, avec deux Nègres de même nation; ils ont été mis trois fois sur les Affiches, ces deux Nègres ont été arrêtés. Ceux qui auront connaissance dudit Nègre Pompée, sont priés d'en donner avis à Me Miailles, Procureur au Port-au-Prince : il y aura récompense." (51)
b) Cramenti
Dans les Antilles anglophones, les Akan (Asante, Ashanti, Fanti, Anyi, etc.) sont bien connus sous appellation Coromantee et ses dérivés. Ce nom découle de "Fort Kormantin", un établissement esclavagiste du Ghana, bâti par les Anglais en 1638 et occupé par les Hollandais de 1655 à 1868 sous le nom de Fort Amsterdam.


(Fort Amsterdam/Kormantin au Ghana actuel)
Source : https://en.wikipedia.org/wiki/Fort_Amsterdam,_Ghana#/media/File:Ghana,_Abandze,_Fort_Amsterdam_%28Cormantijn%29,_hoofdingang.jpg

  (Emplacement du Fort Amsterdam/Kormantin au Ghana actuel)
Source : https://en.wikipedia.org/wiki/Fort_Amsterdam,_Ghana
 
Par conséquent, à Saint Domingue, les captifs (esclaves) de l'ethnie Akan fut désignés Cromanty, Caramanti, Cramanty, Cramenti, Cramaty, Cronuanty, Croman, etc.:


"Le 8, Mars, nation Cramanty, étampé DAVAU, ne sachant dire le nom ni la demeure de son maître." (52)
c) Mina
De même, à Saint Domingue, on désignait des captifs Akan "Mina, Mine, Minant, Minan, Amina ou Amine"; qu'ils soient du Ghana, du Dahomey (Bénin) ou du Togo.**** La dénomination "Mina" réfère au Fort portugais de Elmina (La Mine) fondé en 1481 sur la côte ghanéenne. Initialement baptisé Saô Jorge de Mina (Saint-Georges-de-la-Mine), ce comptoir portugais achetait l'or extrait par les mineurs Akan, avant que la traite négrière, plus rentable, ait prit le dessus. (53) :


(Fort Elmina ou Fort Saint-Georges-de-la-Mine au Ghana actuel)
Source : https://fr.wikipedia.org/wiki/Elmina#/media/File:Elmina_slave_castle.jpg


(Emplacement de la ville d'Elmina au Ghana actuel)
 Source : https://fr.wikipedia.org/wiki/Elmina


10.1.2 - L'héritage Akan dans le rituel haïtien

Dans le rituel haïtien, l'héritage Akan se reflète principalement à travers les mots : Anmin (ou Anminan), Kwasi, Akann et Ntowo.

a) Anmin, Anminan et Anansi
Les Akan du Ghana (de la Côte d'Ivoire, du Togo et du Bénin) forment la Nation sacrée ou Nanchon Anmin ou Anminan dans laquelle existe une large quantité de Lwa/Jany. Plusieurs de ces Entités divines sont des "Gad", c'est-à-dire des Protecteurs de famille ou personnels. Voici un vèvè du Lwa/Jany Anmin ou Anminan :


 (Vèvè du Lwa/Jany Anminan)
Source : Milo Rigaud. Ve-Ve : Diagrammes Rituels du Voudou. New York, 1974. p.533.

Ce vèvè d'Anminan représente l'archétype de la Nation sacrée Anmin. Il figure le "fil anansi",  qui, en Créole haïtien, signifie "toile d'araignée". (54) Le chant sacré suivant le décrit :


Ti gason nou pral chache fil annasi pou n mare yo...

Traduction :
Jeune homme nous allons prendre du fil d'Anansi (la toile d'Araignée) pour les attacher...

"Anansi" ou "Annasi", un mot Akan, veut dire "Araignée" dans la langue haïtienne. (55) Nous le retrouvons dans cet autre chant sacré :


Marasa Kay la demen,
Anansi a dogwe.

La Divinité féminine Manbo Nansi est vénérée au moins dans le rituel traditionnel du grand Nord haïtien. Et également, Larèn Nansi (la Reine Nansi) reçoit des hommages dans des prières sacrées, au moins dans le Nord d'Haïti. Il faut savoir que chez les Akan, Anansi est le nom de l'Esprit Kuaku Anansi (Kwaku Ananse), l'Araignée primordiale, fils de Nyamé, le Dieu Créateur que l'on nomme également Anansi Kokuroku, c'est-à-dire le "Grand Araignée".


(Affiche de "Kwaku Ananse", 'un court-métrage Akan du Ghana)
Source : Yaanom Multimedia ; http://www.design233.com/kwaku-ananse-film-wins/

D'ailleurs, c'est le schéma de la toile d'Araignée d'Anansi qui forme la base du "Kente", l'étoffe royale emblématique des peuples Akan (ou Ashanti). Car, selon les Akan, Anansi est celui qui a enseigné à deux frères l'art de tisser et de colorier le Kente. (56) :


(Kente, étoffe royale traditionnelle des Akan)
Source : https://en.wikipedia.org/wiki/Kente_cloth#/media/File:KenteCloth.jpg

Partout, dans les Amériques, là où les Akan ont été introduit, une version d'"Ananse" subsiste, sur diverses dénominations, à travers les contes ancestraux :
  • Anansi (Guyana)
  • Anansi, Hanansi, Nansi (Jamaïque)
  • Mr Nancy, Miss Nancy, Aunt Nancy, Ann Nancy, (États-Unis ; Caroline du Nord et Sud)
  • Nansi, Kuent'i Nanzi (Curaçao), Kompa Nanzi (Curaçao, Aruba, Bonaire)
  • Ananse Tori (Suriname)
  • Nanacy, Nancy, Brer Nancy, Brother Nancy (Canada ; Nouvelle Écosse)
  • Ahnancy (Saint Martin)
  • Banansi, Nansi, Boy Nasty, Gulumhanansi (Bahamas)
  • Compè Czien (Grenade)
  • Compère Araignée (Martinique)
  • Ti Malis (Haïti, mais dans un moindre mesure car confondu avec Leuk des Sénégalais) 
  • Sister Nancy, Mr. Spider, Sis Nancy, Nansi Buy Nansi, Compè Anansi, etc. (ailleurs dans les Amériques).
Car, selon le récit Akan (ou Ashanti), Anansi, cette Divinité-Araignée, a reçu la connaissance des contes de la part de son Père Nyame, le Dieu du Ciel, uniquement après qu'il a usé de ses astuces et de sa toile d'araignée pour capturer Osebo, le panthère, Onini, le python et Mmoboro, le frelon.


(Anansi capturant à l'aide de sa toile)
Source : https://pckvtes.wordpress.com/2013/02/28/anansi-captures-osebo-in-a-pitfall-trap/ 

Ainsi, l'héritage Akan dans les Amériques assure la pérennité d'Anansi dans les contes de multiples pays à travers le monde. Anansi prédomine dans les livres pour enfants :


 (Anansi dans livres pour enfants en Amérique)
Source : http://anansistories.com/How_Anansi_Came_book.html

Et de même dans les films d'animation et les romans : 


(Anansi dans les romans en Amérique)
Source :  https://www.amazon.com/Anansi-Boys-Novel-Neil-Gaiman/dp/006051518X

b) Kwasi
Parmi les Lwa de la Nanchon Anminan, on retrouve Anminan Sansan Kwasi Kosi Djoni. Kwasi (ou Akwasi) est un prénom Akan donné aux garçons qui sont nés le dimanche. Voici une annonce de marronnage concernant un commandeur d'atelier de nation Mina, du nom de Coissi (Kwasi) :


"Un Negre, nommé Coissi, nation Mina, Maçon de son métier, n'ayant pour toute étampe que DD entrelacés, sur la poitrine, âgé d'environ 38 à 40 ans, & ayant les joues creuses, une partie des deux machoires sans dents, & de l'autre jaunes & décharnées, les jambes ou genoux cambrés & les pieds en dedans : ledit Negre Commandeur de l'Habitation de M. de St Romes, près le Port-au-Prince, est maron depuis le 14 novembre dernier. Ceux qui le reconnoîtront, sont priés de le faire arrêter, & d'en donner avis audit Sieur de St-Romes, sur son Habitation, audit lieu : il y aura récompense." (57)
Il faut souligner qu'il existe aussi le Lwa Nèg Kwasi Miyan Manyan Dogwe au sein de la Famille des Lwa Azaka ; et que "Kwasi" (Kouassi, Couassi) demeure un nom de famille en Haïti.

c) Akann
Dans le rituel haïtien, le nom "Akan" lui-même est retenu sous la forme de "Akann Nago", indiquant une forme de fusion rituelle avec l'ethnie Nago (ou Yoruba) :


Akann Nago, Lwa mwen, yo pale nou mal o, Ogoun o...
Traduction :
Akann Nago, mon Lwa, on nous calomnie, Ogoun o...

Il est également conservé dans l'appellation du Lwa Ntowo Akanvi Ewa. "Akanvi" est une combinaison hybride : "Akan" (le nom de l'ethnie), et "Vi" qui signifie "Enfant(s)" dans la langue fongbe des Dahoméens. Ainsi, "Akanvi" veut dire "Enfant(s) de Akan", au même titre que "Gedevi" (nom d'un peuple dahoméen) signifie "les Enfants de Gede".

d) Ntowo
De plus, dans Ntowo Akanvi Ewa, le mot "Ntowo", n'est pas anodin. Bien au contraire, dans la structure mystique des Akan, Ntoro (Ntowo) indique le caractère de l'enfant, un héritage paternel. Donc, l'enfant Akan naît avec son Ntowo qui est l'un des 12 traits de caractère suivants :
  1. Bosompra : Le Dur
  2. Bosomtwi : Le Tendre
  3. Bosommuru : Le Distingué
  4. Bosom-Nketea ou Bosompo : L'Audacieux
  5. Bosom-Dwerebe : L'Excentrique
  6. Bosom-Akom : Le Fanatique
  7. Bosomafi : Le Chaste
  8. Bosomayesu : Le Combatif
  9. Bosom-Konsi : Le Virtuoso
  10. Bosomsika : Le Fastidieux
  11. Bosomafram : Le Libéral
  12. Bosomkrete : Le Chevaleresque.
Ayant reçu leur trait de caractère Ntoro de leurs pères, les Akan (pères et fils) se regroupent par type de Ntoro, dans des associations spirituelles distinctes. Et chacune des ces associations Ntoro possède ses propres interdits, ses propres jours de cérémonies, ses surnoms, ses salutations, etc. (58)
Et à Saint Domingue, les captifs Akan ont continué d'associer la vénération de leurs Divinités (Abossom) à la structure Ntoro. De cette association naquit la Nation sacrée ou Nanchon Ntowo qui renferme de multiples Lwa/Jany dont : Ntowo, Nèg Ntowo, Ntowo Akanvi Ewa, Ntowo Twa Grenn, Èzili Ntowo, Figaro Ntowo, Ntowo Belekoun, etc.
Mais, en dépit de l'héritage paternel Ntoro, quant il s'agit de la notion d'Ancêtres divinisés, de clans, et d'obligations de sacrifices mystiques familiales, les Akan, de nature matriarcale, font référence au sang maternel qu'ils désignaient Mogya. (59) Une telle passation d'obligation mystique perdure en Haïti. Mais vaut aussi bien pour le côté maternel que paternel.


10.3 - L'héritage Akan et le rayonnement culturel haïtien

Sur le plan culturel, 2 mots Akan : Kuaku et Anansi contribuent au rayonnement mondial de la culture haïtienne. L'Haïtien est très familier avec "Kuaku", qui est un prénom Akan attribué aux garçons nés le mercredi. Car Coicou est un nom de famille célèbre en Haïti. C'est celui de Jean-Baptiste Massillon Coicou (1867-1908), le fameux poête et diplomate haïtien.


(Jean-Baptiste Massillon Coicou, poête haïtien)
Source : https://fr.wikipedia.org/wiki/Massillon_Coicou#/mediapoête/File:Massillon_Coicou.jpg

Du mot "Anansi" découle des prénoms féminins en Haïti. L'un d'entre eux est "Anasilya", titre de 2 chansons et 1 album des légendaires troubadours haïtiens Ti Paris (1970), et Althieri Dorival (1978) :


  ("Anasilya", Ti Paris, 1970)


 ("Anasilya", Althieri Dorival & L'Ensemble Le Progrès, 1978)

Anansi, la Divinité Araignée Akan, détentrice de la Connaissance, est également "trickster", un farceur. Cette dernière facette l'assimilera, à Saint Domingue/Haïti, avec Gede, les Divinités dahoméennes de la mort, qui sont des farceurs par excellence. Ainsi, de cette symbiose du Lwa Gede (Divinité principale du peuple Gedevi du Bénin) avec Kuaku Anansi (l'Araignée sacrée des Akan du Ghana) naquit Gede Zarenyen (Gede l'Araignée), un Lwa dont la gloire est chantée mondialement depuis des décennies.
Celia Cruz, la vedette cubaine, dans le cadre de sa collaboration avec la chanteuse légendaire haïtienne Martha Jean-Claude, enregistra la chanson traditionnelle haïtienne "Guede Zaina" en 1952 :


 ("Guede Zaiña" Celia Cruz con la Sonora Matancera, 1952)

Entre autres, Johnny El Bravo, le chanteur portoricain, en fit une reprise en 1972. Le chanteur haïtien Simbi fit de même en 1992 :


("Gede Zarenyen", Simbi, 1992)

Puis vint le tour de Kike Harvey (1993), Alquimia La Sonora Del XXI (2003), Oscar De Leon (2006), Haitiando (2010), etc. :


("Gede Zariyen", Haitiando, 2010)

La preuve est donc faite que l'héritage Akan en Haïti fut de nature traditionaliste. D'aucune façon l'islam ne s'est introduit chez les Akan durant la période pré-esclavagiste pour que son influence aurait orienté les drapeaux-rituels haïtiens.


10.4 - Les figurines à forme de centaures en Haïti

Si les figurines haïtiennes étaient pertinentes, pourquoi donc est-ce que la "scientifique" ne les a pas prises en photo? Pourquoi n'a-t-elle pas questionné leurs propriétaires sur leurs origines? Et qu'elle était la race de la tête de femme représentée? Sont-elle de vielles pièces à caractère religieuse ou des oeuvres modernes purement fictives? Tant de questions non répondues par LeGrace Benson.
Mais ce qui est indéniable, c'est que culturellement, Haïti n'est pas si isolé de l'Occident que l'on voudrait le croire. Puisque dès la tendre enfance, le petit écolier haïtien baigne dans les cannons de l'Occident et apprend le Français, l'Espagnol, le Latin, voir même le Grec. Et de cet apprentissage, il est constamment exposé à tous les mythes classiques européens, incluant les centaures.
Voilà pourquoi on ne s'étonne guère de croiser en Haïti des artisanats en forme de centaures comme ceux-là que l'artiste identifie comme tel :


Source : Jean Rony "Art métal Centaur, Haïti féminin moitié cheval demi femme" ; Lien permanent : https://www.haitimetalwallart.com/listing/470887537/female-centaur-haiti-metal-art-half ;


Source : Jean Rony "Centaure femelle, moitié femme Haïti métal Art moitié cheval" ; Lien permanent : https://www.haitimetalwallart.com/listing/493934614/centaure-femelle-moitie-femme-haiti

Ou en forme d'autres figures occidentales antiques que l'artiste, une fois de plus, identifie comme tel :


Source : Jean Rony "Royaume de Triton sur un bateau à la mer, recycler murale en métal art " ; Lien permanent : https://www.haitimetalwallart.com/listing/539758504/royaume-de-triton-sur-un-bateau-a-la-mer 

Source : Jean Rony "Maty, Triton, protecteur des marins hommes" ; Lien permanent : https://www.haitimetalwallart.com/listing/470886047/maty-triton-protecteur-des-marins-hommes


Bref, les arguments révisionnistes, étant basés sur des spéculations enfantines, nous a permis d'établir aisément que les drapeaux-cérémoniels haïtiens ne proviennent pas de l'islam, mais bien de la religion traditionnelle. Nous avons également démontré la richesse de l'héritage ancestral haïtien qui est né du partage, de l'entraide et de la tolérance des divers ethnies amenées de force sur les rives dominguoises. Cet héritage sert de rempart contre tout intrus cherchant à se faufiler dans l'histoire d'Haïti afin d'usurper ce que les Dieux, dans leurs générosité, ont offert à l'Haïtien : la Révolution haïtienne.



* Initiallement mentionné par Patrick Polk. "Sacred Banners and the Divine Cavalry Charge". In : Sacred Arts of Haitian Vodou. Los Angeles, 1995.
** Le Manje yam n'est pas uniquement l'affaire des Ibo. Dans leur pays, les Dahoméens, entre autres peuples, célèbrent également la première récolte de l'igname. (60)
*** Le peuple Massa est connu sur de multiples dénominations : Massa, Masa, Massas, Masana, Banana, Bonana, Yagoua, Magaw, Walia, Walai (Walay), Gumay, etc. Dans ce contexte, les variantes "Masay", "Mousay", ou "Mousayi", répertoriées dans le rituel haïtien, sont tout autant authentiques. Aussi, il ne faut pas confondre le mot haïtien "Masay" qui se réfère au peuple "Massa" du Cameroun et du Tchad, avec le peuple "Massai" du sud du Kenya et du nord de la Tanzanie.
**** Le Ghana n'est pas l'unique lieu d'origine des captifs Mina, étant donné la migration (en partie) du peuple "Mina" vers le Togo (et le Bénin actuel) au 17e siècle chrétien (donc préalable à l'élargissement de la traite française). Au Togo, les Mina se fusionnèrent au peuple Guen pour former l'ethnie Guen-Mina, (61) devenu Amine à Saint Domingue, et Anmin ou Anminan dans le rituel haïtien.  


Notes
(1) Argument de LeGrace Benson reprise par Anne M. Platoff. "Drapo Vodou - Sacred Standards of Haitian Vodou" In : Flag Research Quarterly, 2(3-4). August 2015.
(2) Les Affiches Américaines du samedi 27 mars 1784. Parution no.13. p.209.
(3) Voir  Les Affiches Américaines du mercredi 1 août 1770. Parution No.32, p.324.
(4) Liévin-Bonaventure Proyart. Histoire de Loango, Kakongo, et autres royaumes d'Afrique. Paris, 1776. p.22.
(5) Melville Jean Herskovits. Dahomey, an ancient West African Kingdom. New York, 1938. p.224-225. fig.33.
(6) Robert Farris Thompson. African Art in Motion : Icon and Act in the Collection of Katherine Coryton White. Berkeley, 1974. p.219.
(7) Michka Sachnine, Akin Akinyemi. Dictionnaire yorùbá-français : suivi d'un index français-yorùbá.  Paris, 1997. p.241.
(8) Samuel Adjai Crowther. Vocabulary of the Yoruba Language. Londres, 1852. p.221.
(9) Joseph Ronald Dautruche. "Le Rara de Léogâne : entre fête traditionnelle liée au vodou et patrimoine ouvert au tourisme". In : Ethnologies, vol. 33, n° 2, 2011, p. 123-144.
(10) Voir Les Affiches Américaines du mardi 1 juillet 1777. Parution No.27, p.420.
(11) Akintunde Akinyemi."The Yorùbá Royal Bards : Their Work and Relevance in the Society". in: Nordic Journal of African Studies 10(1): 90-106 (2001)
(12) Michka Sachnine,Akin Akinyemi. Dictionnaire yorùbá-français: suivi d'un index français-yorùbá.  Paris, 1997. p.211.
(13) Édouard Dunglas. "‪Contribution à l'histoire du Moyen-Dahomey : (Royaumes d'Abomey, de Kétou et de Ouidah)‬". In : Études dahoméenes. Volumes 17-20. Dakar, 1956. p.77.
(14) Robert Farris Thompson. African Art in Motion... Op. Cit. p.220.
(15) Ibid. pp.220-221.
(16) Joseph Ronald Dautruche. "Le rara de Léogâne". [en ligne] Lien permanent : http://www.ipimh.ulaval.ca/fiche-rara-leogane-19.html
(17) Becky Parkinson. "Mysterious 'living ghosts' who walk around with bodyguards because villagers fear they will die after touching them." Mirror du 30 juin 2017. [en ligne] ; Lien permanent : https://www.mirror.co.uk/news/world-news/gallery/mysterious-living-ghosts-who-walk-10714320
(18) Joseph Ronald Dautruche. "Le rara de Léogâne". [en ligne] Op. Cit.
(19) Jon Bullock. A salaam alay : Remnants of West African Islam in Haitian Vodou. [ University of Chicago]
(20) Ibid.
(21) LeGrace Benson, “Observations on Islamic Motifs in Haitian Religious Art,” Journal of Caribbean Studies, (1 and 2) (Winter/Spring 1993). Cité dans LeGrace Benson. "How Houngans Use the Light from Distant Stars." In : Vodou in Haitian Life and Culture. New York, 2006. pp.155-179.
(22) LeGrace Benson. "Some Breton and Muslim Antecedents of Voudou Drapo". in: Textile Society of America Symposium Proceedings. Paper 867. 1996.
(23) Robert Farris Thompson. Flash of the Spirit : African & Afro-American Art & Philosophy. New York, 1984. p.228.
(24) Les Affiches Américaines du mercredi 14 mai 1783. Parution No 20, p.262.
(25) Gouvernement de France. "Arrêt du Conseil du Port-au-Prince, touchant un Nègre Africain accusé, qui n'entend pas le Français, et pour lequel il ne se trouve pas d'Interprête. Du 3 Juin 1785". In : Moreau de St-Méry. Loix et constitutions des colonies françoises de l'Amérique sous le Vent. T. 6. pp.760-761.
(26) Moreau de Saint Mery. Description topographique, physique, civile, politique et historique de la partie française de l'isle de Saint-Domingue. Tome 1. Philadelphie, 1797. p.31.
(27) Jude C. U. Aguwa. ‪The Agwu deity in Igbo religion‬: ‪a study of the patron spirit divination and medicine in an African society‬. Unugu, 1995. p.109.
(28) Jon Bullock. Op. cit.
(29) Benjamin Hebblethwaite and Michel Weber. “Arabian Religion, Islam, and Haitian Vodou: The ‘Recent African Single-Origin Hypothesis’ and the Comparison of World Religions.” In Vodou in the Haitian Experience : A Black Atlantic Perspective. Lanham, 2006. pp.209-237.
(30) Jon Bullock. Op. Cit.
(31) Benjamin Hebblethwaite and Michel Weber. Op. Cit.
(32) Les Affiches américaines du mercredi 18 juin 1766. Parution no.25. p.223.
(33) La Dépêche coloniale illustrée du 31 mars 1913. Paris, 1913, pp.89-90.
(34) Maud Gauquelin. De la royauté sacrée à la pluralité religieuse chez les Moundang, du Tchad au Nigeria : Stratégies locales, connexions transnationales. Anthropologie sociale et ethnologie. Paris, 2014. pp.118-119.
(35) Alfred Adler. La mort est le masque du roi : la royauté sacrée des Moundang du Tchad. Paris, 1982. p.13.
(36) Alfred Adler. "Le totémisme en Afrique noire, Systèmes de pensée en Afrique noire". In : Totémisme. Vol. 15. 1998. [En ligne], mis en ligne le 28 mai 2014, consulté le 24 février 2017.
(37) Maud Gauquelin. Op. Cit. p.231.
(38) Bebe Pierre Louis. Réponse sur le blog historique de Bob Corbett. 12 mars 2001."Islamic Influences on Haitian Voodoo". Lien Permanent : http://www2.webster.edu/~corbetre/haiti/voodoo/islam.htm ; Consulté le 28 avril 2015.
(39) Les Affiches américaines du mercredi 2 février 1785. Parution No.5. p.5658.
(40) Michel Pierre Descourtiilz. Voyages d'un naturaliste, et ses observations... Tome 3. Paris, 1809. p.210.
(41) Françoise Dumas-Champion. Les Masa Du Tchad: Bétail Et Société. Paris, 1983. pp.13-14.
(42) Ibid. pp.16-17.
(43) Les Affiches Américaines (Supplément) du mardi 10 novembre 1778. Parution No.44. p.0.
(44) Françoise Dumas-Champion. Op. Cit. pp.212, 214.
(45) Ibid. p.214.
(46) LeGrace Benson. "Qismat of the Names of Allah in Haitian Vodou". In : Journal of Haitian Studies, Vol 8 No. 2, 2002. pp.160-164.
(47) LeGrace Benson. "How Houngans Use the Light from Distant Stars." In: Vodou in Haitian Life and Culture. New York, 2006. pp.155-179.
(48) Doran Ross. "Military Arts of the Fante" [en ligne] ; Lien permanent : https://africa.uima.uiowa.edu/topic-essays/show/9 ; Consulté le 24 décembre 2017.
(49) Courtney E. Kennedy, Mary Brinker. Important African & Oceanic Art Auction:   Heritage Auction Galleries Auction No. 645 June 7, 2007. Dallas. p.58.
(50) Ibid.
(51) Les Affiches Américaines du samedi 20 juin 1789. Parution no.50. p.0.
(52) Les Affiches américaines du mardi 13 juin 1780. Parution no.24. p.191.
(53) Voir Bernard Nantet. Dictionnaire d'Histoire et Civilisations africaines. Paris, 1999. pp.14, 74-93.
(54) Jeannot Hilaire. ‪Foure'antre non kreyòl dayiti‬. ‪Fribourg, 1992. p.199.
(55) Ibid.
(56) Robert Z Cohen. Discovering the Asante Kingdom. New York, 2014. p.26.
(57) Les Affiches Américaines du mercredi 16 janvier 1771. Parution No.3. p.24.
(58) K. A. Busia. (Kofi Abrefa Busia) "The Ashanti of the Gold Coast". In : African Worlds: Studies in the Cosmological Ideas and Social Values of African peoples. Oxford, 1999 (1st ed. 1954). pp.190-209.
(59) Terray Emmanuel. Le pouvoir, le sang et la mort dans le royaume asante au XIXe siècle. In: Cahiers d'études africaines. Vol. 34 N°136. 1994. pp. 549-561.
(60) Voir Melville Jean Herskovits. Dahomey An Ancient West African Kingdom. New York, 1938, p.37.
(61) Voir Ayité Dzidzoe Dovi-Gaba. "La cérémonie de sortie d'enfant chez les Guin-Mina." Lomé, 2015. p.4.




Comment citer cet article:
Rodney Salnave. "Les drapo ne sont pas islamiques".
1 mars 2018 ; modifié le 8 août 2020. [en ligne] Lien permanent : https://bwakayiman.blogspot.com/2018/02/les-drapo-ne-sont-pas-islamiques.html ; Consulté le [entrez la date]


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